Página inicial > Sophia Perennis > Pierre Gordon > Gordon (MH:8-9) – trespasse

Gordon (MH:8-9) – trespasse

quarta-feira 27 de setembro de 2023, por Cardoso de Castro

  

A reclusão, ou morte iniciática, era identificada, ontologicamente, com o trespasse orgânico: os neófitos retirados de suas famílias, são chorados como defuntos; frequentemente conduz-se o luto de uma maneira barulhenta e ostentatória.

tradução

A etnologia prova que em todos os povos da terra, a fonte da religião e do sacerdócio foi o ritual de morte e de ressurreição, — ritual propagado ao final do neolítico, pela segunda teocracia — através do qual o homem sofria e ainda sofre, entre povos ditos «primitivos» ou incivilizados, um período de reclusão seguido de um segundo nascimento.

A reclusão, ou morte iniciática, era identificada, ontologicamente, com o trespasse orgânico: os neófitos retirados de suas famílias, são chorados como defuntos; frequentemente conduz-se o luto de uma maneira barulhenta e ostentatória. A reclusão se efetuava na caverna de uma montanha sagrada; mais tarde, recorria-se a campos iniciáticos instalados à beira de uma água santa, e os noviços residiam em abrigos de folhagens, possuindo o caráter divino. Atualmente, estas duas modalidades de retiro continuam a estar em uso. Faz-se notar então que a concepção retora é sempre aquela da caverna paleolítica onde foi estabelecido o ritual visado: é no «mundo subterrâneo» que os neófitos passam seu tempo de morte, durante o qual se desprendem da aderência ao mundo fenomenal; o campo iniciático é completamente assimilado à gruta dos tempos recuados; é um lugar de trevas; embora instalado na superfície do solo, constitui um «universo-de-sob-a-terra», um mundo transcendente, onde não se vê mais as coisas em sua aparência física, mas em seu mana - mana energético subjacente; não são mais, em outros termos, os olhos de carne que funcionam, é o «terceiro olho», o olho do pensamento. Eis aí noções correntes em todos os países, entre os selvagens. Elas remontam a milênios: a etnografia procede da pré-história, da qual ela é a continuação e, frequentemente, a degradação.

A ressurreição ou segundo nascimento fazia, e ainda faz, do neófito — tornado um iniciado — um homem totalmente novo. Falava-se, e se continua a falar, como de um recém-nascido. Frequentemente, considera-se que ele não mais conhece os gestos da vida profana. Quando deixa a caverna ou o campo iniciático para voltar a sua família, não sabe mais se expressar, nem comer. Deve tudo reaprender. Faz-se sua educação como se se tratasse de uma tutela infantil. Mesmo o interior de seu corpo foi, se crê, modificado; suas entranhas foram como transubstanciadas por seu contato com um alimento sagrado.

Original

L’ethnologie prouve, nous l’avons signalé en divers ouvrages, que, chez tous les peuples de la terre, la source de la religion et du sacerdoce fut le rituel de mort et de résurrection, — rituel propagé, vers la fin du néolithique, par la seconde théocratie : nous avons exposé l’origine lointaine de ce rituel, en vertu duquel l’homme subissait — et subit encore de nos jours chez de nombreuses peuplades « primitives » ou demi-civilisées — une période de réclusion suivie d’une seconde naissance [1].

La réclusion, ou mort initiatique, était identifiée, ontologiquement, avec le trépas organique ; il en va toujours de la sorte dans l’ethnographie : les néophytes arrachés à leurs familles, sont pleurés comme défunts ; assez souvent on en mène le deuil d’une façon bruyante et ostentatoire. La réclusion s’effectuait dans la caverne d’une montagne sacrée ; plus tard, on recourut à des camps initiatiques installés au bord d’une eau sainte, et les novices résidèrent dans des abris de feuillages, possédant le caractère divin. Actuellement ces deux modalités de retraite continuent d’être en usage. Il est à remarquer d’ailleurs que la conception rectrice est toujours celle de la caverne paléolithique où fut mis au point le rituel envisagé : c’est dans le « monde souterrain » que les néophytes passent leur temps de mort, durant lequel ils se dégagent de l’adhérence au monde phénoménal ; le camp d’initiation est complètement assimilé à la grotte des temps reculés ; c’est un lieu de ténèbres ; bien qu’aménagé à la surface du sol, il constitue un « univers-de-sous-terre », un monde transcendant, où l’on ne voit plus les choses dans leur apparence physique, mais dans leur mana énergétique sous-jacent ; ce ne sont plus, en d’autres termes, les yeux de chair qui fonctionnent, c’est le « troisième œil », l’œil de la pensée. Ce sont là des notions courantes en tous pays chez les sauvages. Elles remontent à des millénaires : l’ethnographie procède, en effet, de la préhistoire, dont elle est la continuation et, le plus souvent, la dégradation.

La résurrection ou seconde naissance faisait, et fait encore, du néophyte — devenu un initié — un homme totalement neuf. On en parlait, et on continue d’en parler, comme d’un nouveau-né. Fréquemment, il est censé ne plus connaître les gestes de la vie profane. Lorsqu’il quitte la caverne ou le camp initiatique pour revenir dans sa famille, il ne sait plus s’exprimer, ni manger. Il doit tout réapprendre. On fait son éducation comme s’il s’agissait d’un enfantelet. Même l’intérieur de son corps a été, croit-on, modifié ; ses entrailles ont été comme transsubstantiées par leur contact avec une nourriture sacrée [2].


[1On ne saurait contester que les initiations ethnographiques, telles qu’elles se pratiquent chez les demi-civilisés et chez les « primitifs », constituent authentiquement des initiations. Elles sont, certes, dégradées, et, autant qu’il nous est possible de nous en rendre compte, ne conduisent plus aux états spirituels élevés, qui forment le but fondamental de l’initiation. Mais elles procèdent sans nul doute du rituel primordial de mort et de résurrection, dont elles conservent très souvent le cadre ancien. Elles se proposent, en outre, de faire accéder l’homme à un niveau supérieur de la pensée et à une vision ultraphysique de la matière. Cette transformation s’accomplit, d’autre part, grâce à l’union avec l’ancêtre initiateur, dont on copie les gestes et dont on suit l’enseignement. Refuser à de telles disciplines la qualification & initiatiques, pour le motif que l’initiation doit être réservée à une élite, et ne jamais s’adresser à tous les membres d’un groupe, c’est introduire dans l’essence de l’initiation des considérations de fait qui lui sont étrangères. Il est évident qu’en l’état actuel de la mentalité humaine on n’imagine guère les états spirituels et suprahumains, visés par l’initiation, comme accessibles à une masse sociale quelconque, en dehors d’une élite très restreinte. Mais l’on ne saurait envisager cette situation particulière et accidentelle, comme devant retentir sur la définition même de l’initiation, — définition qui doit, par principe, négliger les contingences.

[2Cette seconde naissance qui met au jour un homme entièrement nouveau, reste essentielle chez les peuples de l’ethnographie actuelle. « L’expression australienne qui désigne l’initiation se traduit en anglais : making young men, fabrication de jeunes gens. On les fabrique littéralement : une cérémonie, chez les Kurnai, a pour but de leur ouvrir les poings, de leur délier les pieds ; on leur apprend à respirer ; la cérémonie terminée, les jeunes gens sont des hommes. Un mythe Arunta décrit le même processus ; c’était ainsi que faisaient les Ancêtres, avant qu’ils fussent des hommes » (Marcel Mauss Manuel d’Ethnographie 1947, p. 180).