Página inicial > Modernidade > Louis Lavelle > Lavelle : Introduction à la dialectique de l’éternel présent

Lavelle : Introduction à la dialectique de l’éternel présent

quinta-feira 28 de agosto de 2014, por Cardoso de Castro

  Sommaire  

 II

Cependant la description qui précède a besoin d’être approfondie. Aussi longtemps que l’on ne dépasse pas la notion d’être, il nous semble, tant nous sommes habitués à considérer toute réalité comme affectant la forme d’une chose, qu’il y ait un primat de l’objectivité sur la subjectivité. Et si nous nous bornons à montrer que l’être que nous saisissons, c’est un être qui nous est propre en tant qu’il implique un être qui nous dépasse et dans lequel il est pour ainsi dire situé, nous continuons obscurément à considérer cet être qui nous est propre comme un corps qui occupe une place déterminée dans l’infinité de l’espace. Mais ce n’est là qu’une image qu’il faut interpréter. Il importe de montrer maintenant que l’être est acte, comment toute description est une genèse. et pourquoi la relation elle-même ne prend sa véritable signification que si elle se change en participation.

Or, il est facile de voir que rien de ce qui est objet ou chose n’a de sens autrement que par rapport à un sujet qui le pense comme extérieur à lui, bien qu ’Ù ne soit actualisé que par lui, ce qui est justement le sens que nous donnons au mot apparence ou phénomène. Quant à ce sujet lui-même, il réside dans l’acte intérieur qu’il accomplit et que l’on ne peut pas réduire à la pensée d’un objet ou d’une chose, car le propre de cet acte, c’est d’engager l’existence même du moi, c’est de la faire être dans une opération qu’il lui faut accomplir et sans laquelle il ne serait rien, par laquelle il dispose du oui et du non, que l’on peut définir comme étant sa liberté, qui fait de lui à chaque instant le premier commencement de lui-même, et porte le nom de pensée dès qu’elle s’applique à quelque objet pour se le représenter et le nom de volonté dès qu’elle s’applique à lui pour le modifier. Encore est-il vrai que cet objet ne cesse de le dépasser et que le moi ne réussit jamais à le réduire à sa propre opération, qui, dans l’ordre intellectuel, garde toujours un contenu perceptif ou conceptuel et, dans l’ordre volontaire, ne parvient jamais à pousser la modification jusqu’à l’infini, c’est-à-dire à en faire une création.

Cet acte intérieur est inséparable à la fois de l’initiative qui le met en jeu et de la conscience qui l’éclairé. C’est là seulement où il s’exerce que nous pouvons dire moi. Il est notre être même au point où il se fonde sans qu’il nous soit possible, de le récuser. Il est véritablement un absolu qui n’est l’apparence ou le phénomène de rien. Son essence est de se produire lui-même avant de produire aucun effet, qui doit être considéré comme extérieur à lui et comme étant la marque à la fois de sa manifestation et de sa limitation, bien plutôt que de sa puissance et de sa fécondité. Et la philosophie commence là où précisément l’être cesse d’être confondu avec l’objet, mais s’identifie avec cet acte intérieur et invisible et qui est tel qu’il faut seulement l’accomplir pour qu’il soit.


Ver online : Louis Lavelle