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Guénon: l’imperfection du langage

segunda-feira 1º de dezembro de 2008, por Cardoso de Castro

  

(...) il ne faut pas oublier que toute expression, étant l’enveloppement dans une forme, s’effectue nécessairement en mode individuel, si bien que, lorsque nous voulons parler de quoi que ce soit, même des vérités d’ordre purement métaphysique, nous ne pouvons le faire qu’en descendant à un tout autre ordre, essentiellement relatif et limité, pour les traduire dans le langage qui est celui des individualités humaines. On comprendra sans peine toutes les précautions et les réserves qu’impose l’inévitable imperfection de ce langage, si manifestement inadéquat à ce qu’il doit exprimer en pareil cas ; il y a là une disproportion évidente, et l’on peut d’ailleurs en dire autant pour toute représentation formelle, quelle qu’elle soit, y compris même les représentations proprement symboliques, pourtant incomparablement moins étroitement bornées que le langage ordinaire, et par conséquent plus aptes à la communication des vérités transcendantes, d’où l’emploi qui en est fait constamment dans tout enseignement possédant un caractère vraiment « initiatique a et traditionnel [1]. C’est pourquoi, comme nous l’avons déjà fait remarquer à maintes reprises, il convient, pour ne point altérer la vérité par une exposition partielle, restrictive ou systématisée, de réserver toujours la part de l’inexprimable, c’est-à-dire de ce qui ne saurait s’enfermer dans aucune forme, et qui, métaphysiquement, est en réalité ce qui importe le plus, nous pouvons même dire tout l’essentiel. (René Guénon, Les états multiples de l’être)


[1Nous ferons remarquer incidemment, à ce propos, que le fait que le point de vue philosophique ne fait jamais appel à aucun symbolisme suffirait à lui seul à montrer le caractère exclusivement « profane » et tout extérieur de ce point de vue spécial et du mode de pensée auquel il correspond.