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Choix d’un point de départ permettant de définir l’idée d’agapé.
quarta-feira 26 de setembro de 2007, por
Pour pouvoir affirmer que le commandement d’aimer est spécifiquement chrétien — ce qui est hors de douter — il faudrait voir clairement que la raison n’en est pas dans le commandement lui-même, mais dans le sens tout nouveau qu’il a reçu du christianisme; et que l’amour exigé est loin d’avoir la même signification dans le christianisme et dans le judaïsme. Faire appel au commandement d’aimer pour expliquer l’idée chrétienne d’agapè, c’est tourner dans un cercle vicieux. Jamais on ne pourrait expliquer ce qu’est l’amour au sens chrétien, l’agapè, si’ l’on n’avait à sa disposition que les deux textes : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur » et « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». En effet, au lieu d’expliquer l’idée d’agapè par la loi d’amour, c’est en saisissant l’originalité de l’agapè chrétienne que nous comprendrons le commandement d’aimer au sens chrétien. Il faut donc chercher un autre point de départ.
L’une des différences les plus frappantes qui existent entre le commandement d’aimer au sens de l’Ancien Testament et au sens chrétien, réside dans la portée universelle qu’il prend dans le christianisme. Dans le judaïsme, l’amour est exclusif et particulariste. Il a pour objet le « prochain », dans l’acception primitive et restreinte du terme. Il « ne s’adresse qu’au prochain » et non aux autres. Les limites de ce qu’embrasse la notion de « prochain » et, par conséquent, celle de l’amour, peuvent varier considérablement. Elles peuvent comprendre les proches et ceux qui font partie du même peuple. Selon cette dernière interprétation, les deux commandements concordent exactement. L’amour éprouvé pour Dieu correspond à l’amour du prochain, entendu comme l’amour du peuple choisi par Dieu, du « peuple élu pour appartenir à Dieu ». Cet amour peut également s’élargir et comprendre les étrangers qui vivent sur le territoire" du peuple élu. Quoiqu’il en soit, il conserve toujours ses limites. L’amour chrétien, au contraire, brise toutes ces frontières; il est universel et s’adresse à tous. « Ici, il n’y a ni Juif, ni Grec, ni esclave, ni maître, ni homme, ni femme » (Gai., 3, 28). Partant de cette affirmation, on a souvent voulu interpréter l’idée chrétienne de l’amour par la tendance cosmopolite et individualiste si répandue dans le monde antique; cette tendance se manifestait, avant tout, dans des milieux influencés par le stoïcisme et faisait tomber les barrières nationales et sociales devant les idées rationnelles et morales d’humanité et de cosmopolitisme. Pour les raisons que nous allons indiquer, on ne peut utiliser ce point de départ pour expliquer ce qu’est l’amour chrétien, car il ne nous permet pas de dégager un seul trait essentiel de la conception chrétienne de l’amour. En effet, l’universalisme n’est pas, en définitive, le caractère décisif du christianisme et, dans celui-ci, il a d’autres causes que dans le stoïcisme, par exemple.