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Schérer (1971:140-143) – Daseinanálise de Binswanger (I)
domingo 24 de dezembro de 2023
destaque
Reafirmemos primeiro as noções de princípio que separam a concepção psiquiátrica de Binswanger da de Freud , pois talvez tenhamos deixado este ponto na incerteza, estando mais preocupados, antes de mais, em mostrar como a investigação concreta freudiana poderia enriquecer os dados de uma análise teórica do que em insistir nas diferenças. Binswanger não se contenta em acrescentar ao sistema freudiano a noção de "mente" que, sob a forma de logos, é o objeto da nossa investigação atual. Ao contrário de Jacques Lacan, Binswanger não é o exegeta de Freud; se ele extrai um sentido de certos conceitos freudianos, que ele reinterpreta e utiliza, é para dizer claramente que esse sentido está ausente, não só na letra, mas também no espírito da psicanálise. É por isso que ele insiste em encerrar a psicanálise sobretudo numa concepção que, por princípio, a impede de abordar certos problemas: quaisquer que sejam as modificações essenciais que Freud possa ter feito a uma concepção ingenuamente naturalista do homem, a psicanálise não pode ir além dos seus próprios [141] postulados de objetivação dos poderes instintivos e das "instâncias" do sujeito. Binswanger opõe a esta atitude objetivista, que ignora o problema da comunicação e o substitui pelo esquema de um mecanismo de transferência, uma psicoterapia que toma a comunicação como tema, tal como substitui uma concepção biológica da vida por uma concepção existencial da história individual.
original
Réaffirmons d’abord les notions de principe qui séparent la conception psychiatrique de Binswanger de celle de Freud, car peut-être avons-nous laissé ce point dans l’incertitude, plus appliqués d’abord à montrer comment la recherche concrète freudienne pouvait enrichir les données d’une analyse théorique qu’à insister sur les différences. Binswanger ne se contente pas d’ajouter au système freudien la notion d’« esprit » qui, sous la forme du logos, fait actuellement l’objet de notre recherche. A l’inverse de ce que sera Jacques Lacan, Binswanger n’est pas l’exégète de Freud ; s’il dégage de certains concepts freudiens un sens qu’il réinterprète et utilise, c’est pour affirmer nettement que ce sens est absent, non seulement dans la lettre, mais aussi dans l’esprit de la psychanalyse. Aussi tient-il à enfermer avant tout celle-ci dans une conception qui lui interdit par principe l’accession à certains problèmes : quelles que soient les modifications essentielles que Freud ait apportées à une conception naïvement naturaliste de l’homme, la psychanalyse ne peut dépasser ses propres [141] postulats d’objectivation des puissances instinctives et des « instances » du sujet. A cette attitude objectivante, qui fait abstraction du problème de la communication pour lui substituer le schéma d’un mécanisme du transfert, Binswanger oppose une psychothérapie qui prend la communication pour thème, de même qu’il substitue à une conception biologique de la vie une conception existentielle de l’histoire individuelle.
Il n’est pas sans intérêt de noter d’abord que la psychiatrie binswangérienne est orientée de préférence vers les cas, non de névrose, mais de psychose, en dehors desquels la pratique freudienne est censée s’être tenue. Hormis, en effet, Le cas du président Schieber, exemple clé, sans doute, et sur lequel une conception psychanalytique des psychoses trouvera à s’appuyer, c’est aux névroses que le traitement psychanalytique freudien s’applique par excellence, pour la raison, précisément, que le contact avec l’autre reste toujours possible et présupposé et ne soulève donc pas de problème insoluble pour l’inauguration de l’analyse et son prolongement. En abordant le domaine des psychoses, l’analyse se heurte, au contraire, à une région de la psychopathologie où la communication est refusée par principe. Cette région du délire, qu’il soit paranoïaque ou schizophrénique, s’inscrit dans une relation négative à l’autre qui, si elle ne fait pas obstacle à toute forme de communication, l’interdit au plan où elle pourrait amorcer le mouvement vers la guérison. Devant la limitation des moyens psychothérapiques et de la théorie elle-même, le psychothérapeute sera alors tenté par deux voies divergentes mais complémentaires : celle d’une « constitution » de la « conscience » ou de la « personne » « morbide », de la reconnaissance de son univers propre et par principe inaccessible; celle d’un effort de compréhension et de participation aux états de conscience [142] et au langage de l’être affecté. Prétention contradictoire en ce qu’elle commence par postuler l’isolement et l’indépendance des vécus de conscience, mais entend les ramener à des règles universelles de compréhensibilité, et vise une communication sympathique de personne à personne, en transgressant la limitation de ces vécus. Le recours en ce domaine à une simple phénoménologie du vécu et de la personne ne saurait être que d une utilité seconde et cache les données essentielles du problème. La première de ces données est que, si nous voulons pouvoir parler du délire selon son sens, et donc communiquer avec lui, nous ne pouvons le faire qu’à un tout autre niveau que celui où la séparation des consciences personnelles nous le rend justement incompréhensible. La deuxième est que la maladie n’est pas un « mode de conscience », mais un « mode de présence au monde ». A déplacer ainsi les données du problème, on pourra saisir comment présence délirante et présence non délirante s’enchaînent l’une l’autre et se rapportent l’une à l’autre; elles ne sont pas dans une relation d’étrangeté absolue, sinon l’une ne pourrait parler de l’autre, mais la seconde ne peut se projeter sur la première sans détruire son originalité. La communauté entre les deux domaines ou régions de l’être ne peut donc se fonder que sur une transcendance, celle du « nous » qui oriente toute la philosophie binswangérienne. Mais, pour n’être jamais absente, cette transcendance peut être toutefois occultée, et le cas privilégié du malade qui sombre dans le délire apporte précisément une clarté sur le fait que, tout en étant communication originaire, le Dasein peut être arraché à la communication effective et s’orienter vers la mort. Tout le problème de la communication se trouve ainsi ramené à une détermination de ce « nous », dans lequel se tient aussi le délirant, qui constitue la base à partir de [143] laquelle nous pouvons décrire et comprendre l’expérience délirante en tant qu’expérience, mais qui se définit pour le sujet de l’existence en termes antinomiques de présence au monde.
SCHÉRER, René. Philosophies de la communication. Paris: Société d’Édition d’Enseignement Supérieur, 1971