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Richir (PM:10-12) – 2ª e 3ª transformações do pensamento mítico
sábado 16 de outubro de 2021, por
La seconde transformation, corrélative de la première comme des autres que nous allons examiner, de la pensée mythologique par rapport à la pensée mythique – transformation frappant immédiatement quand on compare les uns aux autres les récits mythiques et les récits mythologiques –, est que, dans ces derniers, les hommes sont pratiquement absents : ils n’interviennent, au mieux que par allusion furtive (au début de la Théogonie d’Hésiode, à propos d’Eros), et en tout cas, ils ne sont impliqués par ce qui se passe qu’au terme du récit de fondation. Ce qui concerne les hommes n’est repris que dans les récits épiques ou dans les « légendes », parallèles aux récits mythologiques de fondation proprement dits. Ce qui est mis en scène en ceux-ci est censé être méta-humain ou sur-humain, et les dieux, dans leur identité symbolique, sont à la fois immortels et engendrés – comme le soulignait déjà Platon dans le Timée , 41 a-b. En ce sens, le paradoxe des dieux condense bien [11] quelque chose de ce qui est aussi le paradoxe de toute institution symbolique, qui paraît bien, dans son irréductibilité (son absence d’origine), comme à la fois engendrée et immortelle. Coextensivement, dans les récits mythologiques il n’y a plus de « métamorphoses » ou de passages constants du « naturel » ou du mondain au « surnaturel » ou au supra-mondain, car celui-ci est toujours et à jamais dans la distance de l’invisible – s’il y a des passages, c’est, encore une fois dans l’épopée ou dans la « légende ». Quelque chose du « merveilleux » mythique s’est irrémédiablement perdu dans l’austérité effrayante et sublime des intrigues entre les dieux, et c’est ce qui a pu donner, sans doute, à la mythologie, l’apparence d’une sorte de « progrès » dans l’« abstraction ».
Cette apparence est renforcée par la troisième transformation : il y a déjà, dans les récits mythologiques, une sorte de principe de non-contradiction implicite attaché à l’identité symbolique des dieux : comme si l’« imagination » mythique s’y dégageait de ses transformations pour ainsi dire sédimentées en concrétudes en perpétuelle métamorphose, pour se reprendre plus « purement » dans les enchaînements réglés de l’intrigue, dans une sorte de logos [1] qui, devant composer, aux deux sens du terme, avec l’identité symbolique des dieux, prend la place prépondérante. Ce qui est très remarquable, en effet, c’est que les « métamorphoses » de dieux à d’autres dieux sont désormais interdites, et que l’élément génétique du récit est re-présenté, en général, par deux formes d’engendrement, soit par scissiparité par-thénogénétique, en général d’une déesse à d’autres dieux et déesses, soit par union sexuelle d’un dieu et d’une déesse. Cela donne lieu à des généalogies divines, dont l’esprit est bien congruent aux problèmes de légitimité de l’institution symbolique de la royauté : ces généalogies sont du même coup des sortes de dynasties, ce qui témoigne bien de ce que c’est l’institution symbolique dans son ensemble, comme institution tenue et garantie par une autorité ou un pouvoir, qui est interrogée quant à son sens. Cela n’empêche pas, mais implique, que la pensée généalogique pose de tout nouveaux problèmes à la pensée : non seulement celui de la parthénogenèse, mais celui de la désormais constante transgression de la prohibition de l’inceste, comme de l’interdit jeté sur le matricide et le parricide, sans compter le problème de la division sexuelle entre dieux et déesses. C’est ce qui fera dire, notamment, aux philosophes, en Grèce, que les récits mythologiques sont en réalité barbares et impies.
D’un autre côté cependant, la sorte de condensation symbolique à l’œuvre dans l’identité symbolique de tel ou tel « personnage » divin permet de « diviser » et d’« analyser », au fil de généalogies, les pouvoirs, les caractères ou les attributs symboliques toujours plus ou moins refondus ensemble dans les récits mythiques. L’intrigue symbolique du récit mythologique est aussi l’intrigue de leur séparation progressive à partir d’un « mélange » originaire, ou tout au moins d’une masse encore inchoative, et en ce sens, elle est extraordinairement riche en correspondances harmoniques, de second degré par rapport au fil manifeste de l’intrigue. Le nouveau porte toujours l’ancien en écho, et ce, de multiples façons, ce qui rend le « décryptage » du récit quasi-infini, car au bout du compte, rien ne se perd, mais le [12] tout s’explicite par codages et recodages dans les codages, de manière à ce que, déployé, il exhibe un équilibre harmonique entre tous les « pouvoirs », « caractères » et « attributs » qui ont été recensés. S’il y a donc un logos dans la mytho-logie, c’est un logos harmonique, au sens qu’a dégagé H. Maldiney [2], logos dont, au reste, le « cratylisme » n’est pas absent – toute la difficulté, immense, étant que les jeux de mots ou les jeux sur les étymologies sont, par leur caractère plus ou moins « fantaisiste », réglés par le logos harmonique de la mythologie, et qu’il est donc extrêmement difficile de « retrouver » sans les avoir déjà comprises les supposées intentions des « rédacteurs » des récits mythologiques.
[1] Classiquement assimilé, depuis les philosophes, au mythos.
[2] H. Maldiney, Aîtres de la langue et demeures de la pensée, L’Age d’Homme, Lausanne, 1975.