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HB: âtmâ

sábado 3 de fevereiro de 2024

  

De là aussi la prière : "Ce que Tu es, puissé-je l’être (NA: Taittirîya Samhitâ (Yajur Vêda Noir), I, 5, 7, 6.)", et le sens éternel de la question critique : "De qui sera-ce le départ lorsque je partirai d’ici (NA: Prash. Up  ., VI, 3 ; cf. réponses dans Chândogya Upanishad  , III, 14, 4 et Kaush. Up., II, 14.) ?" de moi-même ou du «Soi immortel", du "Conducteur (NA: Chândogya Upanishad, VIII, 12, 1 ; Maitri Upanishad  , III, 2 ; VI, 7. Pour le hgemwn Aitarêya Aranyaka, II, 6 et Rig Vêda Samhitâ, V, 50, 1.)". Si l’on a réalisé effectivement les véritables réponses, si l’on a trouvé le Soi et fait tout ce qu’il y avait à faire (kritakritya), sans aucun résidu de potentialité (krityâ), la fin dernière de notre vie est actuellement atteinte (NA: Aitarêya Aranyaka, II, 5 ; Shankhâyana Aranyaka, II, 4 ; Maitri Upanishad, VI, 30 ; cf. Taittirîya Samhitâ (Yajur Vêda Noir), I, 8, 3, 1. Kritakritya, "tout en acte" correspond au pali katamkaranîyam dans la "formule Arhat" bien connue.). On ne saurait trop insister sur le fait que la liberté et l’immortalité (NA: Amritattwa, littéralement "immortalité" ; dans toute la mesure où il s’agit d’êtres nés, soit dieux, soit hommes, ce mot n’implique pas une durée sans fin, mais la "totalité de la vie" ; on doit entendre : ne mourant pas prématurément (Shatapatha Brâhmana, V, 4 ; I, 1 ; IX, 5, 1, 10; Panchavimsha Brâhmana, XXII, 12, 2, etc.). Ainsi la totalité de la vie de l’homme (âyus = aeon) est de cent ans (Rig Vêda Samhitâ, I, 89, 9 ; II, 27, 10, etc.) ; celle des Dieux est de "mille ans" (XI, 1, 6, 6, 15) ou de la durée que représente ce chiffre rond (Shatapatha Brâhmana, VIII, 7, 4, 9; X, 2, 1-11, etc.). Dès lors, quand les Dieux, qui, à l’origine, étaient "mortels", obtiennent leur "immortalité" (Rig Vêda Samhitâ, V, 3, 4, et X, 63, 4, ; Shatapatha Brâhmana, XI, 2, 3, 6, etc.), cela ne doit être compris que dans un sens relatif et ne signifie pas autre chose que leur vie, comparée à celle des hommes, est plus longue (Shatapatha Brâhmana, VII, 3, 1, 10, Shankara  . Sur les Br. Sûtra, I, 2, 17 et II, 3, 7, etc.). Dieu seul, comme "non-né" ou "né seulement en apparence" est absolument immortel ; Agni, vishwâyus = pyr aionos, seul "immortel parmi les mortels, Dieu parmi les Dieux" (Rig Vêda Samhitâ, IV, 2, 1 ; Shatapatha Brâhmana, II, 2, 2, 8, etc.). Sa nature intemporelle (akâla) est celle du "maintenant" sans durée, dont nous, qui ne pouvons penser qu’en termes de passé et de futur (bhûtam bhavyam) n’avons et ne pouvons avoir l’expérience. De Lui toutes choses procèdent, et en Lui elles s’unifient (êko bhavanti) à la fin (Aitarêya Aranyaka, II, 3, 8, etc.). En d’autres termes, l’"immortalité" est de trois ordres : la longévité humaine, l’æviternité des Dieux, et l’immortalité sans durée de Dieu (sur l’æviternité, voir saint Thomas d’Aquin  ., Sum. Theol., I, 10, 5). Les textes hindous eux-mêmes ne permettent aucune confusion : toutes les choses sous le Soleil sont au pouvoir de la Mort (Shatapatha Brâhmana, II, 3, 37, X, 5, 1, 4). Pour autant qu’elle descend dans le monde, la Divinité elle-même est un "Dieu qui meurt" ; il n’y a dans la chair aucune possibilité de ne jamais mourir (Shatapatha Brâhmana, II, 2, 2, 14; X, 4, 3, 9 ; Jaiminîya Upanishad Brâhmana, III, 38, 10, etc.) ; la naissance et la mort sont indissolublement liées (Bhagavad Gîtâ, II, 27; Angutara Nikâya, IV, 137 ; Sutta Nipâta, 742). On peut observer que le grec athanasia a des significations analogues ; pour l’"immortalité mortelle", cf. Platon  , Banquet  , 207, D-208 B, et Hermès, Lib., XI, I, 4a et Ascl., III, 40 b.) peuvent être, non seulement atteintes, mais encore réalisées ici-même et maintenant aussi bien que dans un quelconque au-delà. Celui qui "est délivré en cette vie" (jîvan mukta) ne "meurt plus" (napunar mriyatê) (NA: Shatapatha Brâhmana, II, 3, 3, 9 ; Brihadâranyaka Upanishad, I, 5, 2, etc. Cf. Luc, 20, 36; Jean, II, 26.). "Celui qui a compris le Soi contemplatif sans âge et sans mort, qui n’a en lui aucun manque et qui ne manque de rien, celui-là ne redoute pas la mort (NA: Atharva Vêda Samhitâ, X, 8, 44; cf. Aitarêya Aranyaka, III, 2, 4.).". Étant déjà mort, il est, comme le çoufi, "un mort qui marche (NA: Mathnawî, VI, 723 f. La parole "Mourez avant que vous ne mouriez" est attribuée à Mohammed  . Cf. Angelus Silesius  , "Stirb ehe du stirbst".)". Un tel homme n’aime plus ni lui-même ni les autres : il est le Soi de lui-même et des autres. La mort à soi-même est la mort aux autres ; et, si le "mort" semble ne pas être égoïste, ce n’est pas pour quelque motif altruiste, mais à titre accidentel, et parce qu’il est littéralement sans ego. Délivré de lui-même et de toutes conditions, de tous devoirs et de tous droits, il est devenu Celui qui se meut à son gré (kâmachârî) (NA: Rig Vêda Samhitâ, IX, 113, 9 ; Jaiminîya Upanishad Brâhmana, III, 28, 3 ; Shankhâyana Aranyaka, VII, 22; Brihadâranyaka Upanishad, II, 1, 17, 18, Chândogya Upanishad, VIII, 5, 4 ; VIII, I, 6 (cf. D, I, 72) ; Taitt. Up., III, 10, 5 (de même dans Jean, X, 9).) comme l’Esprit (Vâyu, âtmâ dêvânâm) qui "va où il veut" (yathâ vasham charati) (NA: Rig Vêda Samhitâ, IX, 88, 3 ; X, 168, 4 ; cf. Jean, III, 8 ; Gylfiginning, 18.), n’étant plus, comme le dit saint Paul  , "sous la loi". 37 Hindouisme et Bouddhisme I L?Hindouisme Théologie et Autologie

De Bénarès le Bouddha gagne Uruvêlâ, non loin de la moderne Bodhgayâ, et rencontre en chemin un groupe de trente jeunes hommes mangeant sur l’herbe avec leurs femmes. L’un d’eux n’était pas marié et avait amené avec lui une femme qui venait de s’enfuir en emportant leurs vêtements. Les jeunes hommes demandent au Bouddha s’il n’a pas vu cette femme. Le Bouddha répond : "Qu’en pensez-vous, jeunes gens : qu’est-ce qui serait mieux pour vous, poursuivre cette femme, ou poursuivre le Soi ?" (âtmânam gavis) (NA: Vinaya Pitaka, I, 23 (Mahâvagga, I, 14). Cf. Visuddhi Magga, 393 (râjânam gavêsitum udâhu attânam.? Chândogya Upanishad, VIII, 7, 1, âtmâ... anvêshtavyah.). Ils répondent qu’il serait mieux de poursuivre le Soi, et ils se convertissent. C’est ici que l’on rencontre pour la première fois la doctrine du Bouddha concernant le Soi réel. A Uruvêlâ, il se rend à l’ermitage d’une communauté de Brâhmanes adorateurs du Feu et exprime le désir de passer la nuit dans leur temple. Ils l’avertissent que celui-ci est le repaire d’un Dragon féroce qui pourrait l’attaquer. Le Bouddha ne le croit pas et s’y retire pour la nuit, assis les jambes croisées et vigilant. Le Dragon entre en fureur. Le Bouddha ne le détruira pas, mais il le maîtrisera. Ayant pris sa forme ignée, et étant devenu un "Dragon humain", il combat le feu par le feu. Au matin, il apparaît avec le Dragon apprivoisé dans sa sébile (NA: Vinaya Pitaka, I, 25 (Mahâvagga, I, 15). Cf. l’histoire semblable de la lutte de Mogallâna avec le Dragon Râshtrapâla, Visuddhi Magga, 399 f.). Un autre jour, les adorateurs du Feu sont dans l’impossibilité de fendre leur bois, d’allumer ou d’éteindre leurs feux jusqu’à ce que le Bouddha le leur permette. A la lin les Brahmanes abandonnent leurs offrandes au feu (agnihotra) et deviennent disciples du Bouddha. En rapport avec cela, nous devons citer le cas d’un autre Brâhmane adorateur du Feu, à qui, au cours du dialogue, le Bouddha dit : 119 Hindouisme et Bouddhisme II Le Bouddhisme: Le Mythe

Dans la doctrine brahmanique, notre Soi ou notre Personnalité intérieure, immortelle, imperturbable et bienheureuse, la seule et la même pour tous les êtres, est Brahma immanent, Dieu en nous (NA: Rig Vêda Samhitâ, I, 115, 1, âtmâ jagatas tasthushash cha ; SHB., X, 4, 2, 27, sarvêshâm bhûtânâm âtmâ ; Brihadâranyaka Upanishad, II, 5, 15, sarvêshâm... adhipatih ; III, 5, brahma ya âtmâ sarvântarah ; Maitri Upanishad, V, 1, vishwâtmâ ; Bhagavad Gîtâ, V I, 29, sarvabhûtastham âtmânam, VII, 9, jîvênam sarvabhûtêshu ; Manu I, 54, sarvabhûtâtmâ, etc. Cette doctrine d’une seule «Ame" ou «Soi" par delà ce qui se présente comme nos diverses âmes ou egos, se retrouve chez Platon (notamment Ménon  , 81, où est décrite la naissance universelle et l’omniscience consécutive de l’"Ame Immortelle", cf. note 12) ; chez Plotin   (notamment Ennéades, IV, 9 passim, au sujet de "la réduction de toutes les âmes en une seule") ; chez Hermès (notamment Lib., V, 10 A : "sans corps et ayant des corps en grand nombre, ou plutôt présent dans tous les corps"), cf. Katha Upanishad  , II, 22 (asharîram sharîrêshu ; et X, 2 "l’essence de tous les êtres" ; chez Denys, "L’Être qui pénètre immédiatement toutes choses, bien que non affecté par elles" (De div. nom., II, 10).). Il ne vient de nulle part et ne devient personne (NA: Katha Upanishad, II, 18, nâyam kutachchin na babhûva kachchit ; II, 25, ka itthâ vêda sah ? VI, 13, asti. Cf. Milinda Panho, 73, bhagavâ atthi... na sakkâ... nidassêtum idha vâ idha ; et Shankara (sur Brihadâranyaka Upanishad, III, 3), muktasya cha na gatih kwachit.). "Cela" est ; mais rien d’autre ne peut en être dit qui soit véridique : "Tu ne peux pas connaître Celui qui fait connaître ce qui est connu, et qui est ton Soi en toutes choses (NA: Brihadâranyaka Upanishad, III, 4, 2 ; cf. II, 4, 14 ; IV., 5, 15 ; Aitarêya Aranyaka, III, 2, 4.)". Tout comme Dieu Lui-même ne connaît pas ce qu’Il est, parce qu’Il n’est aucun "ce" (NA: Érigène.). La doctrine bouddhique procède de même par élimination. Notre propre constitution et celle du monde sont analysées à mainte reprise ; et la description de chacune des cinq facultés physiques ou mentales de l’individualité transitoire, à laquelle l’«inculte multitude" s’identifie "elle-même", est suivie de la déclaration : "Ceci n’est pas mon Soi" (na mê so âtmâ). On observera que, parmi les mentalités infantiles qui s’identifient avec leurs accidents, le Bouddha aurait compté Descartes   avec son Cogito, ergo sum. 133 Hindouisme et Bouddhisme II Le Bouddhisme: La Doctrine

Iddhi (Scr. riddhi, de riddh, prospérer emporwachsen) est la vertu, la force (au sens de Marc, V, 30, dunamiV), l’art (par ex. l’adresse du chasseur, Majjhima Nikâya, 1, 152), le talent ou le don. Les iddhis de Iddhi-pâda, "Pas de Puissance", sont supranormales et non anormales. Nous ne pouvons résoudre ici en détail l’apparente difficulté présentée par le fait que les iddhis sont aussi attribuées à l’Adversaire du Bouddha (Mâra, Namuchi, Ahi-Nâga), et nous indiquerons seulement que la Mort est aussi un être spirituel (dans le sens même où Satan reste un "ange"), et que les "pouvoirs" ne sont pas moraux en eux-mêmes, mais représentent bien plutôt des vertus intellectuelles. Les pouvoirs du Bouddha sont plus grands que ceux de l’Adversaire parce que son rang est plus haut ; il connaît le Brahmaloka aussi bien que les mondes jusqu’au Brahmaloka (i. e. sous le Soleil), tandis que le pouvoir de la "Mort" s’étend seulement jusqu’au Brahmaloka, et non au-delà du Soleil.). Quand le disciple s’est rendu maître de toutes ces stations de contemplation au point de pouvoir passer à volonté de l’une à l’autre et de commander de la même manière à cette paix ou synthèse (samâdhi) vers laquelle elles mènent, alors dans cet état d’unification (êko’ vadhibhâva), l’Arhat délivré est rendu aussitôt omniscient et omnipotent ; le Bouddha, décrivant sa propre conquête, peut évoquer ses "précédentes habitations" (pûrva-nivâsa), ou, comme nous serions enclins à dire, ses "naissances passées", dans leur détail. Décrivant ses pouvoirs, il dit : "Frères, je peux manifester (pratyanubhû) des pouvoirs sans nombre ; étant plusieurs je deviens un, comme, de plusieurs que j’étais, je suis devenu un ; visible ou invisible, je peux passer à travers un mur ou une montagne comme s’ils étaient l’air ; je peux plonger dans la terre ou en émerger comme si c’était l’eau ; je peux marcher sur les eaux comme si elles étaient une terre solide (NA: Consulter sur l’histoire primitive de ce pouvoir, W. N. Brown, Walking on the Water, Chicago, 1928. C’est avant tout le pouvoir de l’Esprit (Genèse, 1, 2). C’est typiquement du Vent (Vâyu) invisible de l’Esprit que la motion à volonté est proclamée (Rig Vêda Samhitâ, X, 168, 4, âtmâ dêvânâm yathâ vasham charati... na rûpam tasmai). Dans Atharva Vêda Samhitâ, X, 7, 38, le Yaksha primordial (Brahma) "arpente" le faîte de la mer ; ainsi fait, par conséquent, le brahmachârî, ibid, XI, 5, 26, car "de même que Brahma peut changer de forme et se mouvoir à son gré, de même, parmi tous les êtres, Celui qui comprend peut changer de forme et se mouvoir à son gré" (ShA., VII, 22) ; "Le Seul Dieu (Indra) se tient à son gré sur le courant des eaux" (Atharva Vêda Samhitâ, III, 3, 4 ; Taittirîya Samhitâ (Yajur Vêda Noir), V, 6, 1, 3). "Le mouvement spontané désigne l’essence même de l’Ame" (Phèdre  , 241 Cf.). Il y a là, comme dans toutes les autres formes de lévitation, une question de légèreté et de luminosité (selon les deux acceptions du terme anglais light-ness). Ainsi, dans Samyutta Nikâya, I, 1, le Bouddha dit : "Je ne traversais les flots que lorsque je ne me soutenais pas moi-même et ne faisais aucun effort" (appatittham anâyûham ogham atari) ; c’est-à-dire lorsque j’étais sans poids à la surface de l’eau. Cf. saint Augustin  , Conf., XIII, 4, superferebatur super aquas, non ferebatur ab eis, tanquam in eis requiesceret. Milinda Panho, 84, 85, décrit le pouvoir de voyager dans l’air, "même jusqu’au ciel de Brahma", comme celui de quelqu’un qui sauterait (langhayati) en décidant (chittam uppâdêti) : "C’est là que j’atteindrai", et c’est par celte intention que "son corps devient léger" (kâyo mê lahuko hoti) ;c’est, d’une semblable manière, "par le pouvoir de la pensée" (chitta-vasêna) que l’on se meut dans l’air. La légèreté (laghutwa) se développe par la contemplation (Shwêt. Up., II, 13) ; tous les pouvoirs (iddhi) sont des résultats de la contemplation (jn  âna, cf. note 78) et en dépendent, de sorte que l’on peut demander : "Quel est celui qui ne coule pas au fond du golfe, bien qu’il n’ait ni support ni soutien ?", et, répondre : "Celui qui a la prescience, qui est pleinement intégré (susamâhito), celui-là peut traverser les flots dont le passage est si difficile" (ogham tarati dultaram, Samyutta Nikâya, I, 53, où l’application est d’ordre éthique). Le notion de légèreté est impliquée dans le symbolisme universel des "oiseaux" et des "ailes" (Rig Vêda Samhitâ, VI, 9, 5 ; Panchavimsha Brâhmana, V, 3, 5 ; XIV, 1, 13, XXV, 3, 4, etc.). Réciproquement, pour atteindre le monde informel, on doit avoir rejeté "la charge pesante du corps" (rûpagaru-bhâram, Sdhp., 494), cf. Phèdre, 246 B, 248 D, où c’est "le poids de l’oubli et du mal" qui arrête "le vol de l’âme" ; Saint. Augustin, Conf., XIII, 7, quomodo dicam de pondere cupiditatis in abruptam abyssum et de sublevatione caritatis per spriritum tuum qui superferebatur super aquas ; Dante  , Paradiso, XXVII, 64, mortal pondo, et X, 74, chi non s’impenna si che lassu voli. Autrement dit, le pouvoir de lévitation est exercé "par le moyen d’un enveloppement du corps dans le manteau de la contemplation" (jhâna-vêthanêna sarîram, vêthêtwâ, J., V, 126), où ce pouvoir est en même temps un pouvoir d’invisibilité.); je peux me mouvoir dans l’air comme un oiseau ; je peux toucher de mes mains le soleil et la lune : j’ai sur mon corps un pouvoir qui s’étend jusqu’au monde de Brahma (NA: Samyutta Nikâya, V, 25 f., Angutara Nikâya, I, 254, Samyutta Nikâya, Il, 212, NI., 1, 34 et passim : explications, Vis. 393 f.)". Les mêmes pouvoirs sont exercés par les autres adeptes selon leur degré de perfection dans ces mêmes disciplines et selon la mesure où ils sont maîtres du samâdhi. C’est seulement quand la contemplation (dhyâna) vient à faire défaut que le pouvoir de la libre motion se perd (NA: L’échec prosient du manque de "foi", ou de toute distraction dans la contemplation, selon J., 125-127.). C’est une vieille formule brahmanique (NA: Rig Vêda Samhitâ, IX, 86, 44 ; Jaiminîya Brâhmana, II, 34 : Shatapatha Brâhmana, IV, 3, 4, 5 ; Aitarêya Brâhmana, II, 39-41 ; VI, 27-31 ; Katha Upanishad, VI, 17, etc.) qu’emploie le Bouddha quand il dit qu’il a appris à ses disciples à extraire de ce corps matériel un autre corps, de substance intellectuelle, comme on tire une flèche de son carquois, une épée de son fourreau, un serpent de sa dépouille ; c’est à l’aide de ce corps intellectuel que l’on goûte l’omniscience et que l’on se meut à son gré jusqu’au Brahmaloka (NA: Comme Shankara l’explique en connection avec Prash. Up., IV, 5, c’est le mano-maya âtman qui goûte l’omniscience et il peut être où et tel qu’il veut. Ce "soi ou corps intellectuel" (ânno attâ dibbo rûpî manomayo, D., I, 34, cf. I, 77 ; Majjhima Nikâya, II, 17), le Bouddha a enseigné à ses disciples comment l’extraire du corps physique, et c’est manifestement dans cet autre corps, dans ce "corps intellectuel et divin", et non dans sa détermination humaine, non à quelque moment ou dans quelque condition, "soit de mouvement ou de repos, soit de sommeil ou de veille" (charato chu mê litthato cha suttassa cha jagarassa cha), mais "quand il lui plaît" (yâvadê akankhâmi, comme dans le texte relatif aux iddhis) que le Bouddha lui-même peut se rappeler (anussarâmi) ses précédentes naissances, qu’il peut, sans limites, avec "l’?il divin, transcendant à la vision humaine", considérer les naissances et les morts des autres êtres dans ce monde-ci et dans les autres, dans lesquels et au-delà desquels il a vérifié dès ici et dès maintenant la double délivrance (Majjhima Nikâya, I, 482). L’expression "de sommeil ou de veille" prêterait en elle-même à une longue exégèse. On notera que l’ordre des mots relie le mouvement au sommeil et l’immobilité à la veille. Cela signifie que, comme dans tant de textes des Upanishads, le sommeil dont il s’agit, sommeil dans lequel on "rentre en soi-même" (swapiti = svam apîta, Chândogya Upanishad, VI, 8, 1, Shatapatha Brâhmana, X, 5, 2, 14), n’est pas le sommeil d’épuisement, mais le "sommeil de contemplation" (dhyâna) ; c’est précisément dans cet état de sommeil, où les sens sont résorbés, que se situe la possibilité de se mouvoir à son gré (supto... prânân grihîtwâ swê sharîrê yathâ-kâmam parivartatê, Brihadâranyaka Upanishad, II, 1, 17) ; c’est dans ce sommeil de contemplation que, "terrassant ce qui est physique, l’Oiseau-Soleil, l’Immortel, va où il veut" (dhyâyatîva... svapno bhütwâ... sharîram abhiprahatya... îyatê’mrito yatra kâmam, Brihadâranyaka Upanishad, IV, 3, 7, 11, 12).). 150 Hindouisme et Bouddhisme II Le Bouddhisme: La Doctrine

Toutefois, le texte ne dit positivement rien pour ou contre l’imperceptible présence, dans le véhicule composite, d’une substance éternelle distincte de lui et identique dans tous les véhicules. Nâgasêna, qui refuse d’être regardé comme "quelqu’un" et qui maintient que "Nâgasêna" n’est qu’un nom donné à l’agrégat changeant du phénomène psycho-physique, eût certainement pu dire : "Je vis, toutefois non pas "moi", mais la Loi en moi". Et si nous prenons en considération d’autres textes palis, nous voyons qu’ils tiennent pour admise la réalité du maître de char et de ce qu’il représente, à savoir celui qui "n’est jamais devenu qui que ce soit". C’est la Loi Éternelle (dharma) qui est, en fait, le maître de char (NA: Samyutta Nikâya, I, 33, dhammâham sârathim brûmi ; cf. Jataka., n° 457, dhammo na jaram upêti ; Sutta Nipâta, 1139, dhammam... sanditthikam akâlikam.); et, tandis que "les chars du roi vieillissent, et que le corps de même vieillit, la Loi Éternelle des existences ne vieillit pas (NA: D., II, 120, katam mê saranam attano.)". Le Bouddha s’identifie Soi-même - ce Soi qu’il appelle son refuge (NA: D., II, 101 attâ-dîpâ viharatha atta-saranâ... dhamma-dîpâ dhammasaranâ. D., II, 120 et S. III, 143, kareyya saranattano.) - avec cette Loi (NA: Samyutta Nikâya, 111, 120, Yo kho dhammam passati so mam passati, yo mana passati so dhammam passati. Semblablement D., III, 84, Bhagavato’mhi... dhammajo... Dhammakâyo iti pi brahmakâyo iti pi, dhammabhûto iti pi ; Samyutta Nikâya, II, 221, Bhagavato’mhi putto... dhammajo ; Samyutta Nikâya, IV, 94, dhammabhûto brahmabhûto... dhammasâmi tathâgato : Angutara Nikâya, II, 211, brahmabhûtêna attanâ ; Samyutta Nikâya, III, 83, brahmabhûtâ... buddhâ. Il ne peut y avoir aucun doute au sujet des équations : dhamma = brahma = buddha = attâ : comme dans Brihadâranyaka Upanishad, II, 5, 11, ayam dharmah... ayam âtmâ idam amritam idam brahma idam sarvam. Dans Dhammapada, 169, 364 (II, 25, 2) dhamma est manifestement l’équivalent de brahma, âtman. Un Bouddha est. ce que tous ces termes ou chacun d’eux désignent, et, de ce lait même, il n’est "aucun ce" (akimeano, Mi., 421, Sutta Nipâta, 1063), et il est "sans analogie" (yassa n’atthi upamâ ksvachi, Sutta Nipâta, 1139). "Ce que le Bouddha prêchait, le Dhamma kat? exochen, était l’ordre de la loi de l’univers, immanente, éternelle, incréée, non pas seulement comme interprétée par lui, et encore moins comme inventée, ou décrétée par lui" (PTaittirîya Samhitâ (Yajur Vêda Noir), Pali Dict., art. Dhamma).), et se nomme lui-même "le meilleur des maîtres de char (NA: Sutta Nipâta, 83. buddham dhammasâminam vîtatanham dîpaduttamam sârathinam pavaram. Dhammasâmi = Rig Vêda Samhitâ, X .129, 3, satyadharmêndra, Rig Vêda Samhitâ, X, 129, 3, 8, 9. "Le Roi unique du monde, Dieu des Dieux, Satyadharma" cf., I, 12, 7 ; X, 34, 8 ; et le dharmas-têjomayo’ mritah purushah... âtmâ... brahma de Brihadâranyaka Upanishad, II, 5, 11. Le Dhamma bouddhique (nomos, logos, ratio) est le Dharma éternel de Bu  .. I, 5, 23 ("de Lui, Vâyu, Prâna, les Dieux ont fait leur Loi") ; Brihadâranyaka Upanishad, I, 4, 14 : "Il n’y a rien au-delà de cette Loi, de cette Vérité ; Brihadâranyaka Upanishad, V, 4, 1, satyam hyêva brahma ; La Vérité est une, en vérité, il n’y en a pas d’autre".), celui qui dompte les hommes comme s’ils étaient des chevaux (NA: Vinaya Pitaka, I, 35, etc.). Pour finir, nous trouvons une analyse détaillée du "char", dont la conclusion est que le passager est le Soi (âtman), exposée dans des termes presque identiques, à ceux des Upanishads (NA: J., VI, 252, kâyo tê ratha... attâ vâ sârathi, comme Katha Upanishad, III, 3, âtmânam rathinam viddhi, sharîram ratham. Voir Platon, Lois, 898 C.). Dès lors, l’énoncé d’un commentateur bouddhiste, à savoir que le Bouddha est le Soi spirituel, est assurément correct (NA: Udâna, 67, Commentaire.). Ce "Grand Personnage" (mahâ-purusha) est le maître de char dans tous les êtres. 155 Hindouisme et Bouddhisme II Le Bouddhisme: La Doctrine