Vallin (EI:17-19) – A perspectiva metafísica e o princípio de individuação

(VallinEI)

B) L’immanence de l’Absolu métaphysique et l’origine de la négation. Signification et justification métaphysiques de « l’individuation para la matière » (cont.)

2. L’aspect négatif de l’individuation d’extériorité. Le Néant comme Matière non intelligible et la situation du « principe » d’individuation par la matière

L’ambiguïté fondamentale de cette « Matière » principielle 1, qui n’est ni différente ni non-différente de l’Absolu, exige qu’à côté de sa transparence radicale à l’Absolu, qui s’exprimait dans la matière intelligible, ou dans l’aspect positif de l’individuation d’extériorité, on rencontre un aspect différent et négatif de cette dernière qui s’exprimera notamment dans le principe d’individuation par la matière tel qu’il est envisagé dans l’ontologie classique. Il s’agit ici de l’aspect inférieur de Maya, de ce que les Védântins appellent le « pouvoir d’obnubilation » (avarana shakti) qui voile l’Absolu, ou encore l’Ignorance (Avidya).

Cet aspect de la « matière » est évidemment le plus important pour le métaphysicien en tant que « spirituel » se trouvant aux prises avec la réalité du mal, de la souffrance ou de la mort, qu’il s’agit à la fois de comprendre et de dépasser 2 existentiellement. Aussi Shankara par exemple envisage-t-il en général Maya en tant qu’Avidya, en tant qu’Inscience, racine de l’Ignorance qui nous sépare illusoirement de l’Absolu.

C’est cet aspect de « Maya » que la perspective métaphysique nous paraît situer à la racine de ce que nous appellerons l’individuation séparative. A côté de l’Altérité convertie au « Bien », il y a l’Altérité qui se détourne de lui et qui est à la racine même de l’aspect « substantiel » de la limite. Ou plus précisément, cette Matière non intelligible, cet « irrationnel » principiel qui, envisagé en lui-même est radicalement inintelligible, est comme le reflet inversé de l’Infini, qui ne saurait jamais constituer l’objet d’une Connaissance véritable 3.

Elle est l’Illimité par absence totale de limites essentielles, et c’est elle qui constitue le principe de la limitation séparative ou substantielle. En d’autres termes, elle est ce que nous appelons avec Guenon 4, la « Substance universelle » mais à l’état pur, la face « obscure » de Maya, reflet nécessaire de la plénitude infinie, du Soi, comme l’Altérité intelligible était la toute-puissance intelligible de l’Un. Sous cet aspect elle apparaît comme principe d’Illusion, puissance trompeuse. Sur le plan du Connaître elle est Avidya ou « l’Inscience ». Sur le plan ontologique, elle est puissance diviseuse et constitue l’ensemble des limitations par lesquelles le monde apparaît multiple et distinct de son Principe. Mais la parfaite immanence du Soi à la manifestation exige que cette séparativité soit rigoureusement nulle en tant qu’on chercherait à l’opposer au Principe. La multiplicité comme telle est donc purement illusoire. La séparation est fondée sur l’Ignorance. A cet égard il faut préciser que, chez Shankara, le « monde intelligible » se trouve rigoureusement dépassé lui aussi en tant qu’il présente un aspect de multiplicité. Si Plotin reconnaît une réelle positivité au monde intelligible, on peut dire que le radicalisme métaphysique (mais non dogmatique, comme celui de Parménide) de Shankara admet aussi cet aspect d’illusion au niveau de l’Être lui -même 5, de la Personne divine. Dieu apparaît comme « surimposé » à l’Absolu, dans la mesure où on l’envisage à partir de la limitation qui le constitue, et non à partir de son essence dont cette limitation éminemment essentielle tient toute sa réalité. L’Absolu est donc radicalement transcendant au monde en tant que celui-ci est exclusivement envisagé sous l’aspect des limitations séparatives qui le constituent. La forme rigoureuse du Non-Dualisme shankarien tend à envisager le monde surtout sous cet aspect, dans la mesure où l’aspect positif de Maya serait comme une invitation à interrompre le mouvement transascendant d’intériorisation radicale : l’aspect « personnel » de Dieu ne joue qu’un rôle secondaire dans la voie de la Connaissance pure, du moins dans la « dialectique ascendante » ou la montée vers l’Absolu, Il est clair que l’intériorisation absolue doit dépasser l’aspect limitatif, même principiel, de l’Absolu, avant de pouvoir retrouver le monde, au terme de cette ascension, comme rigoureusement identique à lui.

 

  1. Si Plotin ne parle guère de la matière intelligible dont il craint de divulguer les « secrets », il a du moins une nette conscience de l’ambiguïté de Maya, puisqu’il nous parle de « deux matières » (Enn., II, 4).[]
  2. L’unité profonde de la « voie de la connaissance » de la sagesse védântique tient à l’impossibilité de séparer ces deux aspects : le dépassement exige la connaissance, la connaissance est l’instrument par excellence de ce dépassement, de cette transascendance métaphysique qui est une intégration non seulement pensée mais effectuée ou réalisée.[]
  3. Elle n’est atteinte, comme dit Platon, que par un raisonnement bâtard (cf. Timée, loc. cit.).[]
  4. Cf. Guenon, L’homme et son devenir selon le Vêdanta, p. 45 sq. (Les Editions traditionnelles).[]
  5. Cf. Commentaires de Shankara à la Mandukyopanisad (Ed. Adyar).[]

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