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Bréhier-Plotin: passé

quinta-feira 1º de fevereiro de 2024, por Cardoso de Castro

  
  •  Mais, dira-t-on, nous désirons à chaque moment vivre et être en acte ; être heureux, n’est-ce pas atteindre cette fin ? - Il en résulterait, en premier lieu, que le bonheur de demain serait plus grand que celui d’aujourd’hui, et le bonheur qui suit que celui qui précède ; la vertu ne serait plus la mesure du bonheur. De plus, les dieux seraient plus heureux au moment actuel qu’aux moments précédents ; ils n’auraient pas encore le bonheur parfait et ne l’auraient jamais. De plus, le désir n’atteint son but qu’en atteignant le présent et encore et toujours le présent ; il demande à posséder le bonheur à chaque instant présent, jusqu’au bout ; désirer vivre, c’est chercher à être ; c’est donc désirer une chose présente, puisqu’il n’y a d’être que dans le présent. - Mais on veut des choses futures et à venir. - Ce qu’on veut, c’est ce qu’on possède et ce qu’on est, et non ce qui est passé ou futur : on veut être ce que l’on est déjà ; on ne cherche pas à l’être pour tout l’avenir ; mais on veut que l’état actuellement présent soit actuellement présent. ENNÉADES - Bréhier: I, 5 [36] - Le bonheur s’accroît-il avec le temps ? 2
  •  Mais dans un long bonheur, le plaisir dure plus longtemps. - Il ne faut pas tenir compte du plaisir dans le bonheur ; ou, si l’on définit le plaisir « un acte qui n’est pas entravé », le plaisir est alors identique au bonheur dont il était question. De plus le plaisir qui dure n’occupe à chaque instant que le moment présent ; ce qui en est passé n’est plus. ENNÉADES - Bréhier: I, 5 [36] - Le bonheur s’accroît-il avec le temps ? 4
  •  Et l’homme malheureux ? Son malheur ne s’accroît-il pas avec le temps ? Tous les états pénibles, en durant plus longtemps, n’augmentent-ils pas notre malheur, par exemple, les longues souffrances, les douleurs et tous les états de ce genre ? Et, si leur durée suffit à augmenter notre mal, pourquoi n’en serait-il pas de même dans l’état contraire, le bonheur ? - Dans le cas des peines et des souffrances, l’on peut dire que leur durée les fait croître ; voici, par exemple, une maladie chronique ; elle devient une manière d’être permanente, et l’état du corps empire avec le temps. Supposons en effet qu’il reste le même et que le dommage n’augmente pas ; la peine qui est toujours un état présent sera aussi la même, dès que l’on ne fait pas entrer en compte l’état passé et que l’on n’y a pas égard. Mais le mal, en devenant un état chronique, s’accroît avec le temps ; il augmente, en devenant permanent ; et c’est à cause de cet accroissement de mal et non à cause de la plus grande durée d’un mal qui resterait égal à lui-même que nous devenons plus malheureux. Car, si le mal reste égal à luimême, comme les instants qui composent le surplus de durée n’existent pas simultanément, il ne faut pas dire que le mal en est plus grand ; ce serait compter ce qui n’est plus avec ce qui est. ENNÉADES - Bréhier: I, 5 [36] - Le bonheur s’accroît-il avec le temps ? 6
  •  Pourquoi, s’il faut considérer le présent seul et ne pas faire entrer en compte le passé, ne faisons-nous pas la même chose dans le cas du temps ? En additionnant le passé au présent, le temps, disons-nous, en devient plus grand. Pourquoi donc ne dirions-nous pas que le bonheur grandit comme le temps ? - L’on diviserait ainsi le bonheur selon les mêmes divisions que le temps ; et, inversement, en le mesurant par l’instant présent, on montrera qu’il est indivisible. Quant au temps, il n’est pas absurde de compter celui qui n’est plus ; on peut évaluer le nombre des êtres passés et qui n’existent plus, par exemple, le nombre des morts : mais il est absurde de dire que le bonheur qui n’existe plus est encore, et qu’il est plus grand que le bonheur présent. ENNÉADES - Bréhier: I, 5 [36] - Le bonheur s’accroît-il avec le temps ? 7
  •  Le souvenir des choses passées persistant dans le présent est, dit-on, un avantage pour celui qui est resté plus longtemps heureux. - Que veut dire ce mot : souvenir ? Est-ce le souvenir de la sagesse acquise antérieurement ? On peut dire qu’il en est plus sage, mais on ne reste pas dans la question. Est-ce le souvenir du plaisir ? L’homme heureux a-t-il donc besoin d’un excès de joie, et ne se contente-t-il pas de la joie présente ? Et en quoi le souvenir du plaisir est-il agréable ? Qu’y a-t-il d’agréable à se rappeler que, hier, on a pris plaisir à bien dîner ? Et, au bout de dix ans, ne serait-ce pas encore plus ridicule ? Qu’y a-t-il d’agréable à me rappeler que j’étais un sage, l’an passé ? ENNÉADES - Bréhier: I, 5 [36] - Le bonheur s’accroît-il avec le temps ? 8

    L’être en acte est tout être passé de la puissance à l’acte, qui reste toujours identique à lui-même tant qu’il existe ; en ce sens, la perfection existe même dans le corps, par exemple dans le feu. Mais des êtres de ce genre ne peuvent pas exister éternellement, parce qu’ils sont liés à la mati  ère ; seul, l’être sans composition, qui est en acte, existe toujours. D’ailleurs la même chose peut être en acte sous un rapport, et en puissance sous un autre. ENNÉADES - Bréhier: III, 9 [13] - Considérations diverses 8