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Bréhier-Plotin: géomètre

quinta-feira 1º de fevereiro de 2024, por Cardoso de Castro

  

Attribuer toutes choses à des corps, que ce soit des atomes ou ce qu’on appelle des éléments, engendrer avec le mouvement irrégulier qui en résulte la règle, la raison et l’âme dominatrice, c’est à la fois absurde et impossible, et il est plus impossible encore, si l’on peut dire, de partir des atomes. On a présenté sur ce point beaucoup d’arguments très justes. Si l’on pose de tels principes, il ne s’ensuit pas même d’une façon nécessaire qu’il y ait, pour toutes choses, une nécessité ou, pour parler autrement, un destin. À supposer d’abord que ces principes soient les atomes, ils sont animés d’un mouvement vers le bas (admettons qu’il y ait un bas) ou d’un mouvement oblique quelconque, chacun dans une direction différente. Aucun de ces mouvements n’est régulier, puisqu’il n’y a pas de règle, et leur résultat, une fois produit, serait régulier ! Il n’y a donc absolument ni prédiction ni divination, qu’il s’agisse de la divination par l’art (comment l’art aurait-il pour objet des choses sans règle ?) ou de la divination enthousiaste et inspirée ; car il faut, en ce cas aussi, que l’avenir soit déterminé. Il y aura bien nécessité, pour les corps qui reçoivent le choc des atomes, de subir le mouvement que ces atomes leur impriment ; mais à quels mouvements d’atomes attribuera-t-on les actions et les passions de l’âme ? Quel est le choc qui, en portant l’âme vers le bas, ou en la heurtant d’une manière quelconque, la fera raisonner ou vouloir de telle ou telle manière, donnera au raisonnement, à la volonté ou à la pensée une existence nécessaire et, plus généralement, l’existence ? Et lorsque l’âme s’oppose aux passions du corps ? Quels mouvements d’atomes effectueront nécessairement la pensée du géomètre, celle de l’arithméticien et de l’astronome, et enfin la sagesse ? Car enfin, ce qui est nôtre dans nos actions, ce qui fait de nous des êtres vivants, tout cela disparaîtra, si nous sommes emportés où nous mènent les corps et au gré de leur impulsion, comme des choses inanimées. Les mêmes arguments s’adressent à ceux qui posent comme principes des corps autres que les atomes ; on peut dire en outre que ces corps peuvent nous réchauffer, nous refroidir et faire périr ceux qui sont plus faibles ; mais il n’en résulte aucune des actions propres de l’âme, et il faut faire dériver ces actions d’un principe différent. ENNÉADES - Bréhier: III, 1 [3] - Du destin 3

Chaque être naît conforme à sa propre espèce, cheval parce qu’il est issu d’un cheval, homme parce qu’il est né d’un homme, avec telle nature parce qu’il est né de tel être. Sans doute le mouvement du ciel est une cause additionnelle qui concourt aux événements ; il fournit beaucoup, mais à la manière d’un corps, qui ne contribue qu’aux qualités corporelles, à la chaleur ou au froid, et aux tempéraments physiques qui en résultent. Mais comment produisent-ils les caractères, les occupations et en particulier celles qui, semble-t-il, ne dépendent pas du tout des tempéraments physiques, comme celles de grammairien, de géomètre, de joueur de dés ou d’inventeur ? Comment les vices du caractère seraient-ils un don des astres, puisque les astres sont des dieux ? Et généralement pourquoi dire : ils nous envoient des maux, parce qu’ils en subissent eux-mêmes, dès qu’ils se couchent et se transportent au-dessous de la terre ? Comme si leur état devenait différent, quand ils se couchent par rapport à nous, et comme s’ils n’étaient pas transportés éternellement sur la sphère céleste, et ne gardaient pas un même rapport de position avec la terre ! Il ne faut pas dire non plus qu’un astre, selon l’astre qu’il regarde et suivant sa position à son égard, devient malfaisant ou bienfaisant, et qu’il nous fait du bien, s’il est en bonne disposition, et du mal, dans le cas contraire. Il faut dire plutôt que le mouvement de translation des astres se rapporte à la conservation de l’univers mais qu’il sert aussi à un autre usage ; en tournant ses regards vers les astres comme vers des lettres, celui qui connaît un pareil alphabet lit l’avenir d’après les figures qu’ils forment, en recherchant méthodiquement leurs significations d’après l’analogie ; comme si l’on disait : un oiseau qui vole haut annonce des actions élevées. ENNÉADES - Bréhier: III, 1 [3] - Du destin 6