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Bréhier-Plotin: éternité

quinta-feira 1º de fevereiro de 2024, por Cardoso de Castro

  

[L’auteur] juge que le bonheur est une réalité effective ; or le temps qui est au-delà de l’instant présent, c’est ce qui n’existe plus. D’une manière générale, il veut que ce surplus de durée ne fasse que disperser une unité qui existe tout entière dans l’instant présent. C’est pourquoi le temps mérite d’être appelé image de l’éternité ; l’âme, dans la partie d’elle-même qui se disperse dans le temps, s’efforce de faire disparaître la permanence de son modèle intelligible ; déchue de l’éternité, retranchant la partie d’elle-même qui reste dans le monde intelligible, ne dépendant plus que d’elle seule, elle perd toute permanence ; jusque-là, cette permanence était conservée grâce à son modèle intelligible ; elle est perdue, si tout, dans l’âme, est en devenir. Puisque le bonheur est dans la vie qui est bonne, il faut évidemment le placer dans la vie de l’Être, qui est la meilleure des vies. Il ne faut pas mesurer cette vie par le temps mais par l’éternité : il n’y a pas là de plus ni de moins ; l’éternité n’a pas de longueur ; elle est l’être tel quel, inétendu et intemporel. Il ne faut pas joindre l’être au non-être, le temps à l’éternité, les choses éternelles aux choses temporelles ; il ne faut pas étendre l’inétendu : il faut le prendre dans son ensemble ; le prendre ainsi, c’est prendre non pas un instant indivisible dans le temps, mais la vie éternelle, non pas la vie composée de nombreuses périodes de temps, mais celle qui les contient toutes à la fois. ENNÉADES - Bréhier: I, 5 [36] - Le bonheur s’accroît-il avec le temps ? 7

  •  D’où vient alors que la divination prédise les malheurs et les prédise par l’examen du mouvement du ciel en outre des autres pratiques divinatoires ? - C’est, évidemment, parce que tout est lié, même les contraires ; par exemple la forme est liée à la mati  ère ; dans un être vivant, qui est composé de forme et de matière, en considérant la raison séminale qui informe, on voit par là même le sujet qui reçoit cette forme ; car l’animal composé n’apparaît pas du tout comme équivalent à l’animal intelligible ; on ne peut observer la raison séminale qu’opérant dans le composé et donnant une forme à une matière inférieure. Mais comme l’univers est un animal composé, en observant les choses qui naissent en lui, on voit à la fois la matière dont il est fait et la providence qui est en lui ; car elle s’étend à tout ce qui se produit, c’est-à-dire aux êtres animés, à leurs actions, à leurs dispositions où la raison se mélange à la nécessité ; on voit les mélanges faits ou en train de se faire sans cesse ; mais il est bien impossible de distinguer et d’isoler dans ce mélange, d’une part, la providence avec ce qui lui est conforme, d’autre part le sujet matériel avec ce qu’il donne de lui-même aux choses. Un homme, si sage et si divin qu’il soit, ne pourrait faire ce départ. Mais ce pourrait être, dit-on, un privilège de Dieu. En effet, un devin n’a pas à dire le pourquoi, mais seulement le fait ; son art consiste à lire les caractères tracés par la naturel qui dévoilent l’ordre sans jamais se laisser aller au désordre, ou plutôt à tenir compte des témoignages des révolutions célestes qui nous découvrent les qualités de chaque être et le nombre de ces qualités, avant qu’on les ait vues chez cet être lui-même. C’est que phénomènes célestes et phénomènes terrestres collaborent à la fois à l’organisation et à l’éternité du monde : et pour l’observateur, les uns sont, par analogie, les signes des autres ; les autres espèces de divination emploient d’ailleurs aussi l’analogie. Car les choses doivent non pas dépendre les unes des autres, mais se ressembler toutes sous quelque rapport. Et c’est peut-être le sens de ce mot connu : « L’analogie maintient tout.» Selon l’analogie, le pire est au pire comme le meilleur est au meilleur; par exemple : un pied est à l’autre pied comme un oeil est à l’autre oeil, ou : le vice est à l’injustice comme la vertu est à la justice. Si donc il y a de l’analogie dans l’univers, il est possible de prédire ; et si les choses du ciel agissent sur celles de la terre, elles agissent, comme les parties dans l’animal agissent les unes sur les autres ; l’une n’engendre pas l’autre, puisqu’elles sont engendrées à la fois ; mais chacune, selon sa nature, subit l’effet qu’il lui appartient de subir ; parce que l’une est telle, l’autre aussi est telle. En ce sens encore la raison est une. ENNÉADES - Bréhier: III, 3 [48] - De la Providence, livre deuxième 6

    L’on a dit en quel sens il est autre que ce qu’il voit, en quel sens il est lui-même ce qu’il voit : il voit donc, qu’il soit différent de ce qu’il voit ou qu’il le soit lui-même : que fait-il connaître ? Il annonce qu’il voit un dieu qui engendre un fils d’une beauté suprême et qui engendre toutes choses en lui-même ; il le met au jour sans douleur ; il se complaît en ce qu’il engendre, il aime ses propres enfants, il les garde tous en lui, dans la joie de sa splendeur et de leur splendeur; mais, tandis que tous les autres restent auprès de lui, avec leur beauté, et plus beaux encore d’y rester, il est un fils qui, seul entre les autres, se manifeste au dehors. D’après ce fils, son dernier né, l’on peut voir, comme d’après une image, la grandeur de son père et de ses frères, restés auprès de leur père. Ce n’est pas en vain qu’il affirme qu’il est venu du père, qu’il y a un autre monde que lui, qui a la beauté suprême, qu’il est lui-même une image de la beauté, et qu’il n’est pas permis qu’une belle image ne soit pas l’image de la beauté et de l’être. En toutes ses parties, il imite donc son modèle : il possède la vie ; de l’être, il a l’image, et il a une beauté qui lui vient de là-bas ; il en a l’éternité, puisqu’il est son image ; comment serait-il possible que le Beau tantôt ait son image et tantôt ne l’ait pas, puisqu’il ne s’agit pas d’une image fabriquée par l’art ? car une image, qui existe par nature, dure autant que son modèle. Aussi l’on a tort de croire à la corruptibilité du monde, alors que l’intelligible persiste, et de dire qu’il s’engendre grâce à une volonté délibérée de son créateur ; on ne veut pas comprendre de quelle manière il est créé ; on ne sait pas que, tant que le Beau éclaire, tout le reste ne peut jamais manquer, que les autres choses existent depuis qu’il existe : or il a toujours été et toujours il sera (mots qu’il faut bien employer, s’il nous est nécessaire d’exprimer son éternité). ENNÉADES - Bréhier: V, 8 [31] - De la beauté intelligible 12