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Bréhier-Plotin: propositions

quinta-feira 1º de fevereiro de 2024, por Cardoso de Castro

  

Qu’est-ce que cette dialectique, qu’il faut enseigner aussi au musicien et à l’amant ? C’est une science qui, pour chaque objet donné, rend capable d’exprimer par un discours ce qu’est cet objet, en quoi il diffère des autres, et ce qu’il a de commun avec eux, parmi quels objets et dans quelle classe il se trouve ; elle détermine encore si l’existence lui appartient, quel est le nombre d’êtres d’un genre donné, et le nombre d’êtres qui n’appartiennent pas à ce genre mais en diffèrent. La dialectique porte encore sur le bien et son contraire, et sur toutes les espèces subordonnées au bien et à son contraire ; elle définit l’éternel et le non éternel, procédant toujours scientifiquement et non par opinion. Elle arrête nos errements à travers les choses sensibles, en se fixant dans l’intelligible, et c’est là qu’elle borne son activité5 ; elle éloigne le mensonge et nourrit notre âme, selon le mot de Platon  , dans la plaine de la vérité6 ; elle use de la méthode platonicienne de division pour discerner les espèces d’un genre, pour définir, et pour arriver aux genres premiers ; par la pensée, elle fait, de ces genres, des combinaisons complexes, jusqu’à ce qu’elle ait achevé de parcourir le domaine intelligible ; puis, par une marche inverse, celle de l’analyse, elle revient au principe. À ce moment, elle est en repos et reste en repos tant qu’elle est dans le monde intelligible ; elle ne fait plus de recherche curieuse ; elle se ramasse en une unité ; de là-haut, elle considère la logique qui traite des propositions et des syllogismes, et les lui laisse comme on laisse à d’autres l’art d’apprendre à écrire. Parmi les formes de ces raisonnements, certaines s’imposent nécessairement et avant toute éducation technique. La dialectique soumet à son examen ces formes naturelles ainsi que les autres, et elle estime que les unes sont utiles, tandis que les autres sont superflues et ne sont bonnes que dans les traités techniques qui s’occupent de ces questions. ENNÉADES - Bréhier  : I, 3 [20] - De la dialectique 4

D’où la dialectique tire-t-elle ses principes ? C’est l’intelligence qui donne des principes évidents, à condition que l’âme puisse les recevoir ; de là, la série de ses opérations ; elle compose, combine et divise, jusqu’à ce qu’elle arrive à l’intelligence complète. La dialectique, dit Platon, est le plus pur de l’intelligence et de la prudence. Étant la plus précieuse de nos facultés, elle se rapporte par conséquent à l’être et à la réalité la plus précieuse, à savoir la prudence à l’être, et l’intelligence à ce qui est au-delà de l’être. Quoi donc ! la philosophie n’est-elle pas précieuse entre tout ? Oui, mais la dialectique lui est identique, ou du moins en est la partie précieuse ; n’allons pas croire en effet qu’elle est un simple organe du philosophe, qu’elle soit simplement un ensemble de théorèmes et de règles ; elle porte sur des réalités, et sa mati  ère, ce sont les êtres ; mais c’est qu’elle a une méthode pour aller jusqu’aux êtres, et elle possède, en même temps que les théorèmes, les réalités elles-mêmes. Elle ne connaît que par accident l’erreur et le sophisme ; quand un autre les commet, elle les discerne comme une chose qui lui est étrangère ; elle connaît l’erreur par la vérité qui est en elle, lorsqu’on lui présente une affirmation contraire à la règle du vrai. Elle ignore la théorie des propositions (qui sont à elle comme les lettres sont à un mot) ; mais connaissant la vérité, elle sait ce qu’on appelle une proposition et, d’une manière générale, elle connaît les opérations de l’âme ; la proposition affirmative et la négative ; la règle : Si on nie [le conséquent], on pose [le contraire de l’antécédent], et autres règles analogues ; elle sait si des termes sont différents ou identiques, mais elle a toute ces connaissances d’une manière aussi immédiate que la sensation perçoit les choses, et elle laisse à ceux qui ont le goût de cette étude le soin d’en parler avec minutie. ENNÉADES - Bréhier: I, 3 [20] - De la dialectique 5

Là-bas, la vie est facile ; la vérité est leur mère et leur nourrice, leur substance et leur aliment ; ils voient tout, non pas les choses sujettes à génération, mais les choses qui possèdent l’être, et eux-mêmes parmi elles ; tout est transparent ; rien d’obscur ni de résistant ; tous sont clairs pour tous, jusque dans leur intimité ; c’est la lumière pour la lumière. Chacun a tout en lui, et voit tout en chaque autre : tout est partout, tout est tout, chacun est tout ; la splendeur est sans borne ; chacun est grand, puisque le petit même y est grand ; le soleil y est tous les astres, et chaque astre y est le soleil et tous les astres. Chacun a un caractère saillant, bieh que tout apparaisse en lui. Le mouvement y est mouvement pur ; car il a un moteur qui ne le trouble pas en son progrès, puisque ce moteur n’est pas distinct de lui ; le repos n’y est lias dérangé par le mouvement, parce qu’il ne se mélange à rien d’instable ; le beau y est purement beau, parce qu’il n’est pas contenu en ce qui n’est pas beau. Ce n’est pas sur un sol étranger que chacun avance : l’endroit où il est, c’est cela même qu’il est ; l’endroit d’où il vient ne le quitte pas quand il progresse vers les hauteurs; et il n’est pas vrai que autre il est lui-même, autre la région qu’il habite : car son sujet, c’est l’Intelligence et il est lui-même intelligence. Imaginez que notre ciel visible, qui est lumineux, fasse naitre toute cette lumière qui vient de lui : seulement, ici, de chaque partie différente vient une lumière dilï’érente, et chacune est seulement une partie : là-bas, c’est du tout que vient éternellement chaque chose, et en même temps chaque chose est aussi le iout ; on l’imagine bien comme une partie, mais un regard perçant y voit le tout; comme si l’on avait une vue pareille à celle de Lyncée qui, dit-on, voyait même ce qu’il y a à l’intérieur de la terre ; car cette fable nous suggère l’idée des yeux tels qu’ils sont là bas. Il n’y a là-bas, dans la contemplation, ni fatigue ni satiété, qui forceraient au repos ; car il n’y avait point de vide à combler, de manière qu’on fût satisfait d’être arrivé à bonne fin, en le remplissant ; l’on n’y voit pas un être distinct d’un autre, et le premier, mal satisfait de ce qui appartient au second ; de plus il n’y a là-bas que des êtres sans usure. L’insatiabilité y vient de ce que la satisfaction ne fait pas mépriser celui à qui on la doit : contemplant, on contemple toujours davantage ; se voyant soi-même infini, ainsi que ses objets, on suit ainsi sa propre nature. D’ailleurs la vie n’est une fatigue pour personne, lorsqu’elle est vie pure ; pourquoi celui qui vit de la meilleure des vies se fatiguerait-il ? Cette vie, c’est la sagesse, une sagesse qui ne s’acquiert pas par la réflexion, parce que toujours elle est là tout entière, sans une défaillance, qui seule exigerait la recherche réfléchie : elle est la sagesse première, qui ne vient pas d’une autre; c’est l’ctre même qui est la sagesse ; il n’y a pas d’abord l’être tout seul, et ensuite l’être sage. Aussi nulle sagesse n’est supérieure : la science en soi siège ici à côté de l’Intelligence, avec qui elle se révèle ; comme on dit symboliquement, Diké est parèdre de Zeus. Toutes les choses que l’on voit là-bas sont comme des statues qui peuvent se voir elles-mêmes, spectacles pour des êtres bienheureux. Cette sagesse, l’on en voit la grandeur et la puissance, puisqu’elle a avec elle et qu’elle a produit tous les êtres, que tous la suivent, qu’elle est elle-même les êtres et qu’ils sont nés avec elle, que les deux ne font qu’un, que, là-bas, l’être c’est la sagesse. Nous n’arrivons pas à le comprendre, parce que nous croyons que les sciences sont faites de théorèmes et d’un amas de propositions : ce qui n’est pas vrai, même dans les sciences d’ici-bas. Si quelqu’un de vous en doute, laissons ces sciences pour le moment : mais la science de là-bas, c’est celle dont Platon dit : « Elle n’est pas autre en un autre objet. » Comment est-ce possible, c’est ce qu’il nous a laissé à chercher et à trouver, si nous voulons mériter notre nom de platoniciens. Peut-être donc est-il mieux de commencer ainsi : ENNÉADES - Bréhier: V, 8 [31] - De la beauté intelligible 4

Toutes les choses qui naissent, ceuvres de l’art ou de la nature, sont des produits d’une sagesse, et c’est toujours une sagesse qui en dirige la production. Si des arts se conforment à la sagesse dans sa production, arrêtons-nous à ces arts. Mais l’artisan remonte souvent jusqu’à la sagesse naturelle, selon laquelle les choses de la nature ont été produites : sagesse qui n’est pas faite de théorèmes, mais qui est totale, qui est une unité, non qu’elle soit composée de plusieurs termes qu’elle ramène à l’unité ; bien plutôt, partant de cette unité, elle se décompose en pluralité. Si donc l’on met cette sagesse la première, il suffit ; elle ne vient plus d’autre chose, et elle n’est plus « en autre chose ». Si l’on dit qu’elle est une raison dans la nature et que la nature en est le principe, nous demanderons d’où elle le tient; si c’est d’autre chose, quelle est cette chose; si c’est d’elle-même, arrêtons-nous là ; mis si l’on remonte à l’Intelligence, il nous faut voir alors si l’Intelligence a engendré cette sagesse ; si oui, d’où l’a-t-elle engendrée ? si c’est d’elle-même, ce serait impossible à moins qu’elle ne fût elle-même sagesse. Donc la vraie sagesse, c’est l’être ; l’être véritable, c’est la sagesse ; le prix de l’être lui vient de la sagesse, et, parce qu’il vient de la sagesse, il est l’être véritable. Aussi les êtres qui ne possèdent pas la sagesse, sont dés êtres parce qu’ils existent gràce à la sagesse, mais ne sont pas des êtres véritables parce qu’ils n’ont pas en eux la sagesse. Il ne faut donc pas croire que là-bas les dieux et les bienheureux contemplent des propositions ; il n’y a là-bas aucune formule exprimée qui ne soit une belle image, telle qu’on se représente celles qui sont dans l’âme de l’homme sage, non pas des dessins d’images mais des images bien réelles. C’est pourquoi les anciens disaient que les Idées étaient des êtres et des substances. ENNÉADES - Bréhier: V, 8 [31] - De la beauté intelligible 5

C’est ce qu’ont saisi, me semble-t-il, les sages de l’Égypte, que ce soit par une science exacte ou spontanément : pour désigner les choses avec sagesse, ils n’usent pas de lettres dessinées, qui se développent en discours et en propositions et qui représentent des sons et des paroles ; ils dessinent des images, dont chacune est celle d’une chose distincte ; ils les gravent dans les temples pour désigner tous les détails de cette chose ; chaque signe gravé est donc une science, une sagesse, une chose réelle, saisie d’une seul coup, et non lune suite de pensées comme] un raisonnement ou une délibération. C’est ensuite que de cette sagesse où tout est ensemble vient une image qui est en autre chose, toute déroulée, qui se formule en une suite de pensées, qui découvre les causes pour lesquelles les choses sont ce qu’elles sont, qui fait admirer la beauté d’une pareille disposition. Quiconque connaît ces questions, dira certainement son admiration pour une sagesse qui, sans posséder les causes par lesquelles les êtres sont ce qu’ils sont, l’ait pourtant découvrir ces causes à ceux qui se conforment à elle. Si donc l’on découvre une beauté pareille, qui nous est apparue ce qu’elle doit être, presque sans recherche réfléchie au même sans recherche du tout, il faut aussi que cette beauté existe avant toute recherche et avant toute réflexion : ainsi l’univers (saisissons ce que je veux dire sur un exemple unique, assez ample pour s’appliquer à tous les cas), ENNÉADES - Bréhier: V, 8 [31] - De la beauté intelligible 6