destaque
No § que se segue [em GA29-30] à confissão sem confissão, e ao compromisso de se afastar da Täuschung a propósito da Täuschung em Sein und Zeit, Heidegger sublinhará sucessivamente, colocando-as em itálico, as palavras “Möglichkeit” (possibilidade) e “Vermögen” (poder, faculdade, etc.). A raiz comum, Mögen, de que já falamos longamente, autoriza esta transição, mesmo que seja grave. A essência do logos, recorda-nos Heidegger, reside no facto de nele residir a possibilidade (Möglichkeit) do “ou verdadeiro ou falso”, do “não só positivo mas também negativo” [GA29-30:489]. Esta possibilidade é a essência interna do logos. Só se a apreendermos é que se dá o salto (Absprung: o salto ou o chamamento do saltador, em altura ou para-quedas), a Absprung que nos conduzirá à Ursprung, à origem, aqui à origem do logos. É sempre a figura do caminho, ou mesmo do caminho circular: a partir de um passo para trás (Schritt zurück) ou de um salto, de um apelo ao salto, podemos voltar para trás em direção à origem. O passo é um salto, sempre. Todo passo faz um salto. A diferença entre um passo e um salto é difícil de entender. Todo passo é um salto. Aqui estamos a falar do passo para trás a partir do salto ou da chamada para saltar (Absprung) que conduz de volta à origem (Ursprung) do logos, e a chamada deste salto, o lugar da chamada (Ort des Absprungs [GA29-30:489] ), é a essência interna do logos como a possibilidade co-originária do verdadeiro ou falso, do positivo e do negativo. O logos não é uma formação ou uma construção que acontece por acaso (ein vorhandenes Gebilde), não, ele é na sua essência esta possibilidade (Möglichkeit) disto ou daquilo, do verdadeiro ou do falso, do positivo ou do negativo. E então, num salto, podemos dizer, Heidegger passa da possibilidade ao poder, como se estivesse simplesmente a traduzir e a explicitar a Möglichkeit. Diz ele na seguinte frase, sublinhando a palavra “Vermögen”: “Wir sagen: er ist ein Vermögen zu […] (Dizemos que é um poder para…)” [GA29-30:489].
original
Dans le § qui suit [GA29-30] l’aveu sans aveu, et l’engagement de s’écarter de la Täuschung au sujet de la Täuschung dans Sein und Zeit, Heidegger va souligner successivement, les mettant en italiques, les mots « Möglichkeit » (possibilité) et « Vermögen » (pouvoir, faculté, etc.). La racine commune, ce Mögen dont nous avions déjà beaucoup parlé naguère, autorise cette transition, même si elle est grave. L’essence du logos, rappelle Heidegger, tient à ce qu’en lui réside la possibilité (Möglichkeit) du « ou bien vrai ou bien faux », du « non seulement positif mais encore négatif »[[Μ. Heidegger, Die Grundbegriffe.op. cit., p. 489 (c’est Martin Heidegger qui souligne) ; tr. fr., p. 485. (NdÉ)]]. Cette possibilité est l’essence interne du logos. C’est seulement si nous saisissons cela que s’opère le saut (Absprung : le saut ou l’appel du sauteur, en hauteur ou en parachute), l’Absprung qui nous conduira à l’Ursprung, à l’origine, ici à l’origine du logos. C’est toujours la figure du chemin, voire du chemin circulaire : d’un pas en arrière (Schritt zurück) ou d’un saut, d’un appel à sauter, nous pourrons revenir en arrière vers l’origine. Le pas est un saut, toujours. Tout pas fait un saut. La différence entre le pas et le saut est difficile à saisir. Tout pas est un saut. Ici il s’agit du pas en arrière du saut ou de l’appel pour sauter (Absprung) qui reconduit à l’origine (Ursprung) du logos, et l’appel de ce saut, le lieu de l’appel (Ort des Absprungs [[Ibid., p. 489 (c’est Martin Heidegger qui souligne). (NdÉ)]]), c’est l’essence interne du logos comme possibilité co-originaire du vrai ou faux, du positif et du négatif. Le logos n’est pas une formation ou une construction qui se trouverait là sous la main (ein vorhandenes Gebilde), non, c’est dans son essence cette possibilité (Möglichkeit) de ceci ou de cela, le vrai ou le faux, le positif ou le négatif. Et alors d’un saut, on peut le dire, Heidegger [340] passe de la possibilité au pouvoir, comme s’il ne faisait que traduire et expliciter la Möglichkeit. Il dit dès la phrase suivante en soulignant le mot « Vermögen » : « Wir sagen: er ist ein Vermögen zu […] (Nous disons que c’est un pouvoir de…) »[[Ibid., p. 489 (c’est Martin Heidegger qui souligne) ; tr. fr., p. 485. (NdÉ)]]. Et aussitôt, vous allez le voir, et c’est ce qui m’autorise à trouver ici le schème médiateur avec le Walten, ce pouvoir est défini comme pouvoir du rapport à l’étant comme tel, en tant que tel. Heidegger écrit :
Par pouvoir (Vermögen) nous entendons toujours la possibilité d’une tenue de rapport à [die Möglichkeit zu einem Verhalten zu : donc Vermögen comme Verhalten, propre au Dasein et non à l’animal, vous vous en souvenez], c’est-à-dire, poursuit Heidegger, la possibilité d’un rapport à l’étant en tant que tel (d. h. die Möglichkeit zu einem Bezug zu Seiendem als solchem). Le λόγος est un pouvoir (Der λόγος ist ein Vermögen), c’est-à-dire le fait de disposer d’un rapport de soi à l’étant comme tel (d. h. in sich selbst das Verfügen über ein Sichbeziehen zum Seienden als solchem [souligné par Heidegger [[Dans le tapuscrit, Jacques Derrida souligne d’un trait les mots « das Verfugen über ein Sichbeziehen zum Seienden als solchem », déjà soulignés par Heidegger. (NdÉ)]] ]. A la différence de cela, nous avons appelé aptitude (Fähigkeit) [et c’est l’animal] de se comporter, d’être rapporté en étant pris et emporté [dit maladroitement et confusément la traduction française pour « die Möglichkeit zum Benehmen, dem henommen-hingenommen Bezogensein, Fähigkeit genannt »] [[Μ. Heidegger, Die Grundbegriffe. ..,op. cit., p. 489 (c’est Martin Heidegger qui souligne) ; tr. fr., p. 485. (Traduction modifiée par Jacques Derrida.) (NdÉ)]].
Et nous reconnaissons là la Benommenheit de l’animal, son hébétude encerclée qui n’a pas le Vermögen et le Verhalten, à savoir le pouvoir de se rapporter à l’étant comme tel. Je lis vite tout le § suivant qui explicite clairement ce point, et se termine par le rappel de l’Unheimlichkeit : (lire et commenter Séminaire)
Le λόγος αποφαντικός est le pouvoir de dire « ou bien… ou bien », qui est le pouvoir de la libération du retrait et de la mise en retrait (das Vermögen zum « entweder-oder » des aufweisenden Entbergens und Verbergens in der Weise des Zuweisens), lesquelles [341] montrent sur le mode de l’attribution aussi bien que sur celui de la dénégation. Et dans cette monstration, le « est » (être) vient à la parole dans une signification ou dans une autre. Le caractère de pouvoir (Vermögenscharakter), ainsi orienté, est l’essence du λόγος αποφαντικός ; la constitution essentielle de celui-ci est centrée sur lui. C’est à partir de lui que nous devons chercher à découvrir si nous pouvons voir une indication sur le fondement qui rend possible cette essence. Qu’est-ce qui se trouve à la base de ce pouvoir du λόγος ? Qu’est-ce qui doit nécessairement se trouver à sa base s’il doit pouvoir être ce comme quoi il se manifeste à nous, c’est-à-dire comme possibilité (Möglichkeit) de dire « ou bien… ou bien », possibilité propre à la libération du retrait et à la mise en retrait qui montrent, qui prononcent « être » ? Quand nous aurons répondu à cette question, nous verrons comment, ici comme partout en philosophie, ce phénomène du jugement et de l’énoncé — phénomène banal, élémentaire et déjà tiré dans toutes les directions possibles -nous ramène tout d’un coup dans une dimension qui n’est autre que l’ampleur et l’inquiétante étrangeté (die Weite und Unheimlichkeit) dans laquelle devait de prime abord nous porter l’interprétation de la tonalité fondamentale (Grundstimmung) [[Μ. Heidegger, Die Grundbegriffe…, ορ. cit., p. 489 (c’est Martin Heidegger qui souligne) ; tr. fr., p. 485-486. Les citations en allemand insérées dans ce passage sont transcrites à partir de l’enregistrement de la séance. (NdÉ)]].
Ce recours au pouvoir, ce discours sur la possibilité comme pouvoir, sur le devenir-pouvoir d’une possibilité, donc d’une virtualité et donc comme l’émergence de l’humain au-delà de l’animal, du zôon logon echón au-delà du zôon alogon, donc du signifiant humain au-delà du code ou du signal animal, on le retrouve chez le Lacan que nous évoquions au début, autour de la référence à Robinson, et je voudrais rapidement, à revenir un instant sur le contexte de cette excursion lacanienne dans l’île de Robinson, à la fois ajouter quelque chose, quelque référence au moins, à ce que j’ai déjà dit, l’an dernier, de l’animal selon Lacan, préciser ce langage du « pouvoir », ce passage du « il se peut » comme « il est possible » au « il se peut » comme « il a le pouvoir [342] de », et puis, par la même occasion, recevoir dans ce séminaire un animal à qui nous n’avons pas encore offert l’accueil de notre hospitalité.