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Atualmente, pensa-se que qualquer abordagem filosófica deve começar com considerações sobre a teoria do conhecimento. Todavia, a epistemologia deve, no máximo, servir como uma conclusão. O instigador desse preconceito epistemológico moderno, Kant, nada mais fez com sua Crítica do que concluir a época histórica que começou com a filosofia barroca da natureza. E sua Crítica se refere imediatamente apenas à filosofia daquela época. A revolução copernicana de Copérnico, que transformou o homem em pó no universo, foi acompanhada com muito mais precisão do que Kant supôs por sua “revolução copernicana”, que colocou o homem no trono do mundo como forma de compensação. Copérnico rebaixou excessivamente o homem, às custas de sua humanidade, e Kant o corrigiu imensamente, novamente às custas da humanidade do homem. Toda crítica vem depois da apresentação: o crítico de teatro não tem nada a dizer até que tenha assistido à peça, por mais inteligente que seja — pois sua crítica não precisa atestar sua inteligência antes da apresentação, mas sim a inteligência que demonstra durante a peça — e, da mesma forma, a teoria do conhecimento é absurda se precede o conhecimento e o conhecimento preciso do qual é uma teorização. De fato, todo conhecimento, na medida em que é realmente conhecimento de algo, é um ato único e implementa seu próprio método. Considerações metodológicas sobre a história em geral não substituem de forma alguma uma reflexão baseada em uma única obra, assim como as reflexões de um historiador literário sobre um drama não podem substituir a crítica do jornalista inspirada pela emoção imediata que ele sentiu na apresentação — a fortiori, eu deveria dizer, porque, no que diz respeito a um drama e sua apresentação no palco, o livro é pelo menos o mesmo, enquanto que a “história em geral” felizmente não existe. O que, portanto, se aplica a todo trabalho nesta ou naquela disciplina — a saber, que ele deve abordar seu objeto com um método e dispositivos que são próprios e que nunca foram usados antes, se quiser arrancar seu segredo daquele objeto, e que apenas o aluno tem seus métodos prescritos por seu professor e não pela matéria que está aprendendo — também se aplica, e muito exatamente, à filosofia, com esta exceção, no entanto: devido ao fato ridículo de que a filosofia é uma disciplina universitária com cátedras que as pessoas querem ocupar e iniciantes que têm impresso em seus cartões de visita que são estudantes de filosofia, só encontramos estudantes que nunca vão além da condição de estudante a ponto de não perceberem isso até se aposentarem aos setenta anos e, portanto, mantêm como único o tipo de teoria do conhecimento exigido apenas pelas redações escolares.
Launay
On pense aujourd’hui que toute démarche philosophique devrait débuter par des considérations sur la théorie de la connaissance. En fait, l’épistémologie devrait tout au plus servir de conclusion. L’instigateur de ce préjugé épistémologique moderne, Kant, n’a lui-même, avec sa Critique, rien fait d’autre sinon conclure l’époque historique qui a débuté avec la philosophie de la nature du baroque. Et sa critique ne se réfère immédiatement qu’à la philosophie de cette époque. A la révolution copernicienne, effectuée par Copernic, et qui faisait de l’homme une poussière dans l’univers, correspond de manière beaucoup plus précise que ne le supposait Kant sa « révolution copernicienne » qui, à titre de compensation, assit l’homme sur le trône du monde. Copernic rabaissait de manière démesurée l’homme, aux dépens de son humanité, et Kant y apporta son correctif sans mesure, aux dépens là encore de l’humanité de l’homme. Toute critique est postérieure à la représentation : le critique de théâtre n’a rien à dire avant d’avoir vu la pièce, fût-il très intelligent — car sa critique n’a pas à témoigner de son intelligence avant la représentation, mais bien de celle dont il fait preuve à l’occasion de la pièce —, et de même, la théorie de la connaissance est absurde si elle précède la connaissance et cette connaissance précise dont elle est théorisation. En effet, toute connaissance, pour autant qu’elle soit réellement connaissance de quelque chose, est un acte unique et met en œuvre sa méthode propre. Des considérations méthodologiques sur l’histoire en général ne peuvent du tout se substituer à une réflexion qui part d’une seule œuvre, pas plus que les réflexions d’un historien de la littérature à propos d’un drame ne peuvent remplacer la critique du journaliste inspiré par l’émotion immédiate qu’il a éprouvée lors de la représentation — a fortiori, devrais-je dire, car, pour ce qui est d’un drame et de sa représentation scénique, le livre est au moins le même, tandis que Γ « histoire en général » n’existe heureusement pas. Ce qui vaut donc pour chaque œuvre de telle ou telle discipline — à savoir qu’elle doit aborder son objet avec une méthode et des dispositifs qui lui soient propres et qui n’aient jamais été utilisés auparavant, si elle veut arracher son secret à cet objet, et que seul l’élève se fait prescrire ses méthodes par son maître et non par la matière qu’il apprend —, vaut aussi, et très exactement, pour la philosophie, à ceci près cependant : en raison du fait ridicule que la philosophie est une discipline universitaire avec des chaires qu’on veut occuper et des débutants qui font imprimer sur leurs cartes de visite qu’ils sont étudiants en philosophie, on n’y rencontre que des élèves qui ne dépassent jamais la condition d’étudiant au point qu’ils ne le remarquent pas jusqu’à ce qu’ils prennent leur retraite à soixante-dix ans, et tiennent donc pour unique le type de théorie de la connaissance requis par les seules dissertations scolaires.
Une connaissance dont il ressort vraiment quelque chose est comme un gâteau dans lequel on a mis une fève. Dans L’Étoile de la Rédemption, j’ai placé dès le début l’expérience de la facticité précédant tous les faits de l’expérience réelle. Effectivité qui impose à la pensée, non pas son expression favorite : « ce qui est en propre », mais le mot qui est au principe de toute expérience et écorche la langue de la pensée, le petit mot « et ». Dieu et le monde et l’homme. Ce « et » a été ce qu’il y a de premier dans l’expérience ; on doit donc nécessairement le retrouver dans ce qu’il y a d’ultime pour la vérité. Il faut qu’un « et » se dissimule jusque dans la vérité elle-même, la vérité dernière qui ne peut être qu’une, et qui, au contraire de la vérité des philosophes qui n’est autorisée qu’à se connaître elle-même, doit être vérité pour quelqu’un. Mais si elle est destinée à être vérité unique, elle ne peut l’être que pour un seul. C’est ainsi qu’apparaît la nécessité pour notre vérité d’être multiple et pour « la » vérité de se transformer pour s’aligner sur la nôtre. La vérité cesse ainsi d’être ce qui « est » vrai pour devenir ce qui veut faire ses preuves en se révélant vrai. La notion d’une épreuve de la vérité devient le concept fondamental de cette nouvelle théorie de la connaissance qui se substitue aux anciennes théories de la non-contradiction et de l’objet, et qui, au lieu d’une conception statique de l’objectivité, introduit une conception dynamique. Les vérités désespérément statiques, comme celles des mathématiques — que la théorie traditionnelle prenait pour point de départ sans parvenir réellement à s’en dépêtrer — sont ici considérées comme un cas limite (limite inférieure) comme le repos serait la limite inférieure du mouvement, tandis que les vérités supérieures et suprêmes peuvent, et seulement de notre point de vue, être comprises en tant que vérités et non plus nécessairement cataloguées dans le registre des fictions, postulats et expédients. On part de ces vérités les moins essentielles, du type « deux fois deux égale quatre », sur lesquelles les hommes tombent facilement d’accord sans que cela exige plus qu’un minime effort cérébral — un peu moins pour la table de multiplication, un peu plus pour la théorie de la relativité —, pour atteindre ces vérités qui déjà nous coûtent quelque chose, et accéder aux vérités dont l’homme ne peut faire la preuve qu’en leur sacrifiant sa vie, et enfin parvenir à ces vérités dont la preuve exige que tous risquent leur vie.
Cette théorie messianique de la connaissance, qui évalue les vérités selon le prix exigé pour en faire la preuve et selon le lien qu’elles créent entre les hommes, n’est pourtant pas à même de dépasser les deux attentes du Messie, à jamais irréconciliables, l’attente de la venue du Messie et celle de son retour ; elle ne peut aller au-delà de ce et qui coordonne ces deux engagements ultimes pour la vérité. La preuve ne se trouve qu’en Dieu, à ses yeux seulement la vérité est une. La vérité profane reste donc scindée, double, comme la facticité non-divine, comme ces faits premiers que sont le monde et l’homme qui réapparaissent, avec leur et dans ces faits derniers que sont judaïsme et christianisme, en tant que monde de la loi et foi de l’homme, loi du monde et homme de la foi.