Míguez
15- Todo esto se dice de las cosas consideradas en sí mismas. Pero se da una trabazón de todas ellas, bien en aquellas cosas que ya fueron engendradas, bien en las que se engendran a cada instante, con lo que se originan obstáculos y dificultades. Comprobamos que los animales se devoran unos a otros y que los hombres se atacan entre sí; la guerra, por ejemplo, es algo siempre continuo, que no conoce el descanso ni la tregua. Si, sobre todo, la razón hizo así las cosas, ¿cómo no ha de afirmarse que están bien hechas? No ayuda, sin embargo, a los que así argumentan el afirmar que todo resulta lo mejor posible, que la materia es causa de que las cosas sean inferiores, que el mal no puede ser destruido si las cosas tienen que ser como son y realmente están bien así, que la materia no se presenta como dominadora, sino que ha sido traída a las cosas para que éstas sean lo que son y que, en fin, la razón misma se aparece en mayor grado como la causa de que la materia sea tal cual es. Para esta manera de decir, la razón es un principio y, en realidad, lo es todo, pues todo también, en el proceso de la generación, acontece y se ordena conforme a la razón. Pero, ¿cómo se explica entonces la necesidad de esa guerra implacable que subsiste entre los animales y los hombres? Ese devorarse mutuamente los animales es como una especie de compensación, ciertamente necesaria, entre unos seres que, aunque no se les matase, no podrían durar eternamente. Si en el momento en que deben dejar la; vida, su muerte puede reportar utilidad a otros animales, ¿por qué mirar esto con malos ojos? ¿No comprobamos que nacen de un nuevo modo. cuando son devorados por otros? Ocurre aquí como con el autor muerto en la escena, que, cambiando su apariencia exterior, vuelve a aparecer en otro papel, lo cual significa que no había muerto realmente. Si la muerte, pues, no representa otra cosa que un cambio de cuerpo, cambio análogo al del actor que muda de ropa, o si, incluso, puede representar algunas veces el abandono absoluto del cuerpo, a semejanza del actor que sale definitivamente de la escena para no volver ya más a ella, ¿qué de terrible tiene este intercambio que verifican los animales? ¿No es ello aún mejor que el no haber tenido principio? Porque la privación de la vida les traería consigo la imposibilidad de atender a otros. Mas es claro que se da en el universo una vida múltiple, productora y cinceladora de todos los seres, que no cesa de conformar continuamente unos juguetes, como son los seres vivos, realmente hermosos y de buen ver. Y si los hombres toman las armas unos contra otros, recordemos que son seres mortales y que, luchando en un orden conveniente, nos dan a entender con claridad que las grandes empresas no son otra cosa que juegos con lo cual nos declaran también que la muerte no es algo terrible, y que morir en las guerras y en los combates es adelantar un poco en el tránsito a la vejez o acaso partir mas rápidamente para retornar antes. Si se ven privados de la vida y de las riquezas, conocerán que estas cosas no les pertenecían y, entonces, resultará ridícula esta posesión para sus mismos raptores, que podrán verse desposeídos a su vez por otros; pues, para quienes no se materialice la privación, peor resultará aún la conservación que la pérdida.
Hemos de considerar, por tanto, como algo propio del espectáculo teatral, todos esos crímenes y todas esas muertes, todas esas tomas y saqueos de ciudades. Todas esas cosas no son, en verdad, más que cambios de escena y de forma, la representación de unos lamentos y de unos gemidos. Porque en la vida de cada cual no es el alma la que se encuentra en el interior, sino su sombra, esto es, el hombre exterior que se lamenta, se queja y realiza todas sus cosas sobre esa escena múltiple que es la tierra entera. Así son los actos del hombre que vive una vida inferior y externa, del hombre que desconoce que sus lágrimas y sus actividades más serias no son otra cosa que juegos infantiles. Sólo por el hombre serio son tomadas también en serio las cosas graves; al resto de los hombres es meramente un pasatiempo. Y si estos últimos consideran sus juegos en serio es porque no saben cuál es su papel. Si se experimentan estas cosas en tono de chanza, ha de conocerse también, luego de esquivado el pasatiempo, que habíamos caído en juegos infantiles. Cuando, por ejemplo, Sócrates juega, quien realmente juega es el Sócrates exterior. Conviene, pues, meditar que las lágrimas y los gemidos no constituyen testimonio de males verdaderos; porque es sabido que los niños lloran y se lamentan por males que realmente no lo son.
Bouillet
Voilà pour les choses considérées chacune en elle-même. Quant à la liaison qu’ont entre elles les choses qui ont été engendrées et celles qui sont engendrées à chaque instant, elle mérite d’attirer l’attention, et elle peut donner lieu à quelques objections, telles que celles-ci: Comment se fait-il que les animaux se dévorent les uns les autres, que les hommes s’attaquent mutuellement, qu’ils soient toujours en guerre entre eux sans trêve ni repos ? Comment se fait-il que la Raison [de l’univers] ait constitué un pareil état de choses, et qu’on prétende cependant que tout est pour le mieux ?
Il ne suffit pas ici de répondre : « Tout est pour le mieux possible ; la matière est cause que les choses se trouvent dans cet état d’infériorité ; les maux ne sauraient être détruits. » En effet, il fallait que les choses fussent ce qu’elles sont ; elles sont bonnes. Ce n’est pas la matière qui est venue dominer l’univers : elle y a été introduite pour que l’univers fût ce qu’il est, ou plutôt elle a pour cause la Raison. Le principe des choses est donc la Raison [de l’univers] : elle est tout. C’est par elle que les choses sont engendrées ; c’est par elle qu’elles sont coordonnées dans la génération.
A quoi tient donc [dira–t–on] la nécessité de cette guerre naturelle que les hommes se font les uns aux autres ainsi que les animaux ? — D’abord, il est nécessaire que les animaux se dévorent les uns les autres, parce qu’il faut qu’ils se renouvellent ; ils ne sauraient en effet durer éternellement, lors même qu’ils ne seraient pas tués. Y a-t-il sujet de se plaindre de ce que, condamnés, conne ils le sont, à mourir, ils aient une fin utile aux autres êtres? Qu’a-t-on à dire s’ils ne sont dévorés que pour renaître sous d’autres formes ? C’est comme sur la scène : un acteur qu’on croyait tué va changer de vêtement; et il revient sous un autre masque. – Mais il n’était pas mort réellement. — Si, mourir c’est changer de corps comme le comédien change d’habit; ou bien encore; si c’est dépouiller tout à fait son corps comme à la fin d’une pièce l’acteur quitte son vêtement pour le reprendre plus tard avec son rôle, que trouve-t-on de redoutable dans cette transformation des animaux les uns dans les autres ? Ne vaut-il pas mieux pour eux vivre à cette condition que de n’avoir jamais été ? La vie serait alors complètement absente de l’univers, et elle ne pourrait se communiquer à d’autres êtres. Mais, comme il y a dans l’Univers une Vie multiple, elle produit et elle varie tout dans l’existence ; en se jouant en quelque sorte, elle ne se lasse pas d’engendrer sans cesse des êtres vivants, remarquables par la beauté et la proportion de leurs formes. Les combats que les hommes, ces êtres mortels, se livrent les uns aux autres; avec cet aspect de régularité que présentent les danses pyrrhiques, montrent bien que toutes ces affaires regardées comme si sérieuses ne sont que des jeux d’enfants, et que la mort n’a rien de terrible. Mourir dans les guerres et les batailles, c’est devancer de bien peu le terme fatal de la vieillesse, c’est partir plus tôt pour revenir ensuite. Sommes-nous dans notre vie dépouillés de nos richesses, nous devons remarquer qu’elles ont appartenu à d’autres avant nous, et qu’elles forment, pour ceux qui nous les ont ravies, une bien fragile possession; puisqu’ils en seront à leur tour dépouillés par d’autres, et que, s’ils ne sont pas dépouillés de ces richesses, ils perdront encore plus à les garder. Quant aux meurtres, aux massacres, à la prise et au pillage des villes, nous devons les considérer du même oeil qu’au théâtre nous regardons les changements de scène et de personnages, les pleurs et les cris des acteurs [[La comparaison de la vie avec une tragédie se trouve dans le Philèbe de Platon (t. II, p. 416 de la trad. de M. Cousin) : « Dans la tragédie et la comédie de la vie humaine, le plaisir est mêlé à la douleur. » Le stoïcien Ariston de Chios a dit aussi : « Le sage ressemble à un bon acteur qui, sous le masque de Thersite comme sous celui d’Agamemnon, remplit toujours convenablement son rôle. » (Diogène Laërce, VII, § 160.).]].
Ici-bas, en effet, comme au théâtre, ce n’est pas l’âme, l’homme intérieur, c’est son ombre, l’homme extérieur, qui s’abandonne aux lamentations et aux gémissements, qui se donne tant de mouvement sur la terre, et qui en fait la scène immense d’un drame à mille actes divers. Tel est le caractère des actions de l’homme qui ne considère que les choses placées à ses pieds et hors de lui, et qui ignore que ses larmes et ses occupations sérieuses ne sont que des jeux [[« Ce ne sont pas les choses elles-mêmes qui troublent les hommes ; ce sont les opinions qu’ils ont des choses. Ainsi la mort n’est point terrible : car elle aurait paru telle à Socrate ; mais elle nous parait terrible parce que telle est l’opinion que nous nous en faisons. Quand donc nous serons empêchés, ou troublés, ou affligés, accusons, non les autres, mais nous-mêmes, c’est-à-dire nos opinions. » (Épictète, Manuel, § 8.)]]. L’homme vraiment sérieux ne s’occupe sérieusement que d’affaires vraiment sérieuses, tandis que l’homme frivole ne s’applique qu’à des choses frivoles. En effet, les choses frivoles deviennent sérieuses pour celui qui ne connaît pas les occupations vraiment sérieuses, et qui est lui–même frivole. Si l’on vient à se mêler à ces enfantillages, que l’on 60 sache du moins que l’on est tombé dans des jeux d’enfants où l’on a oublié son propre personnage. Si Socrate se mêle à ces jeux, ce n’est que l’homme extérieur qui y prend part en lui. Ajoutons enfin que les larmes et les gémissements ne prouvent pas que les maux dont on se plaint soient des maux bien réels : car souvent les enfants pleurent et se lamentent pour des maux imaginaires.
Guthrie
OBJECTION OF INTERNECINE WAR AMONG ANIMALS AND MEN.
15. The above considerations suffice for things studied each in itself. The mutual relation, however, between things already begotten, and those that are still being begotten from time to time, deserves to attract attention, and may give rise to some objections, such as the following: How does it happen that animals devour each other, that men attack each other mutually, and that they are always in ceaseless internecine warfare? How could the reason (of the universe) have constituted such a state of affairs, while still claiming that all is for the best?
RESPONSIBILITY CANNOT BE SHIFTED FROM REASON WHICH IS RESPONSIBLE.
It does not suffice here to answer: “Everything is for the best possible. Matter is the cause that things are in a state of inferiority; evils could not be destroyed.” It is true enough, indeed, that things had to be what they are, for they are good. It is not matter which has come to dominate the universe; it has been introduced in it so that the universe might be what it is, or rather, it is caused by reason (?). The principle of things is, therefore, the Logos, or Reason (of the universe), which is everything. By it were things begotten, by it were they co-ordinated in generation.
NECESSITY OF INTERNECINE WARFARE.
What then (will it be objected) is the necessity of this natural internecine warfare of animals, and also of men? First, animals have to devour each other in order to renew themselves; they could not, indeed, last eternally, even if they were not killed. Is there any reason to complain because, being already condemned to death, as they are, they should find an end which is useful to other beings? What objection can there be to their mutually devouring each other, in order to be reborn under other forms? It is as if on the stage an actor who is thought to be killed, goes to change his clothing, and returns under another mask. Is it objected that he was not really dead? Yes indeed, but dying is no more than a change of bodies, just as the comedian changes his costume, or if the body were to be entirely despoiled, this is no more than when an actor, at the end of a drama, lays aside his costume, only to take it up again when once more the drama begins. Therefore, there is nothing frightful in the mutual transformation of animals into each other. Is it not better for them to have lived under this condition, than never to have lived at all? Life would then be completely absent from the universe, and life could no longer be communicated to other beings. But as this universe contains a multiple life, it produces and varies everything during the course of its existence; as it were joking with them, it never ceases to beget living beings, remarkable by beauty and by the proportion of their forms. The combats in which mortal men continually fight against each other, with a regularity strongly reminding of the Pyrrhic dances (as thought Plato), clearly show how all these affairs, that are considered so serious, are only children’s games, and that their death was nothing serious. To die early in wars and battles is to precede by only a very little time the unescapable fate of old age, and it is only an earlier departure for a closer return. We may be comforted for the loss of our possessions during our lifetime by observing that they have belonged to others before us, and that, for those who have deprived us thereof, they form but a very fragile possession, since they, in turn, will be bereft thereof by others; and that, if they be not despoiled of their riches, they will lose still more by keeping them. Murders, massacres, the taking and pillaging of towns should be considered as in the theatre we consider changes of scene and of personages, the tears and cries of the actors.
ALL THESE CHANGES OF FORTUNE AFFECT ONLY THE OUTER MAN IN ANY CASE.
In this world, indeed, just as in the theatre, it is not the soul, the interior man, but his shadow, the exterior man, who gives himself up to lamentations and groans, who on this earth moves about so much, and who makes of it the scene of an immense drama with numberless different acts (?) Such is the characteristic of the actions of a man who considers exclusively the things placed at his feet, and outside of him, and who does not know that his tears and serious occupations are any more than games. The really earnest man occupies himself seriously only with really serious affairs, while the frivolous man applies himself to frivolous things. Indeed, frivolous things become serious for him who does not know really serious occupations, and who himself is frivolous. If, indeed, one cannot help being mixed up in this child’s play, it is just as well to know that he has fallen into child’s play where one’s real personality is not in question. If Socrates were to mingle in these games, it would only be his exterior man who would do so. Let us add that tears and groans do not prove that the evils we are complaining of are very real evils; for often children weep and lament over imaginary grievances.
MacKenna
15. These considerations apply very well to things considered as standing alone: but there is a stumbling-block, a new problem, when we think of all these forms, permanent and ceaselessly produced, in mutual relationship.
The animals devour each other: men attack each other: all is war without rest, without truce: this gives new force to the question how Reason can be author of the plan and how all can be declared well done.
This new difficulty is not met by the former answer; that all stands as well as the nature of things allows; that the blame for their condition falls on Matter dragging them down; that, given the plan as we know it, evil cannot be eliminated and should not be; that the Matter making its presence felt is still not supreme but remains an element taken in from outside to contribute to a definite total, or rather to be itself brought to order by Reason.
The Divine Reason is the beginning and the end; all that comes into being must be rational and fall at its coming into an ordered scheme reasonable at every point. Where, then, is the necessity of this bandit war of man and beast?
This devouring of Kind by Kind is necessary as the means to the transmutation of living things which could not keep form for ever even though no other killed them: what grievance is it that when they must go their despatch is so planned as to be serviceable to others?
Still more, what does it matter when they are devoured only to return in some new form? It comes to no more than the murder of one of the personages in a play; the actor alters his make-up and enters in a new role. The actor, of course, was not really killed; but if dying is but changing a body as the actor changes a costume, or even an exit from the body like the exit of the actor from the boards when he has no more to say or do, what is there so very dreadful in this transformation of living beings one into another?
Surely it is much better so than if they had never existed: that way would mean the bleak quenching of life, precluded from passing outside itself; as the plan holds, life is poured copiously throughout a Universe, engendering the universal things and weaving variety into their being, never at rest from producing an endless sequence of comeliness and shapeliness, a living pastime.
Men directing their weapons against each other – under doom of death yet neatly lined up to fight as in the pyrrhic sword-dances of their sport – this is enough to tell us that all human intentions are but play, that death is nothing terrible, that to die in a war or in a fight is but to taste a little beforehand what old age has in store, to go away earlier and come back the sooner. So for misfortunes that may accompany life, the loss of property, for instance; the loser will see that there was a time when it was not his, that its possession is but a mock boon to the robbers, who will in their turn lose it to others, and even that to retain property is a greater loss than to forfeit it.
Murders, death in all its guises, the reduction and sacking of cities, all must be to us just such a spectacle as the changing scenes of a play; all is but the varied incident of a plot, costume on and off, acted grief and lament. For on earth, in all the succession of life, it is not the Soul within but the Shadow outside of the authentic man, that grieves and complains and acts out the plot on this world stage which men have dotted with stages of their own constructing. All this is the doing of man knowing no more than to live the lower and outer life, and never perceiving that, in his weeping and in his graver doings alike, he is but at play; to handle austere matters austerely is reserved for the thoughtful: the other kind of man is himself a futility. Those incapable of thinking gravely read gravity into frivolities which correspond to their own frivolous Nature. Anyone that joins in their trifling and so comes to look on life with their eyes must understand that by lending himself to such idleness he has laid aside his own character. If Socrates himself takes part in the trifling, he trifles in the outer Socrates.
We must remember, too, that we cannot take tears and laments as proof that anything is wrong; children cry and whimper where there is nothing amiss.