Léon Chestov – Les sources de la connaissance

Si Éros est la source de la connaissance suprême, c’est aux éclairs, aux illuminations soudaines que nous devons certainement accorder notre confiance. Ainsi faisaient les anciens, tandis que les modernes s’appuyant sur les sciences exactes exigent, eux, l’unité de la connaissance. La théorie des idées chez Platon n’est une théorie que de nom. Elle n’est que très faiblement liée à ces buts derniers et les mythes lui sont plus chers que les « conclusions rationnelles », et pourtant c’est pour obtenir celles-ci que nous allons encore vers Platon. Or on peut dire que les mythes chez Platon régnent sur la dialectique et que souvent cette dernière devient pour le philosophe but en soi. Platon jouit de la musique des idées, il aime les idées pour autant qu’il perçoit à travers elles une harmonie étrange, pleine de charme, à laquelle les oreilles humaines demeurent sourdes d’ordinaire; les idées l’attirent indépendamment de leur vérité, de leur conformité au réel. Le philosophe « amoureux» ne se soucie nullement de l’attitude des autres hommes à l’égard de la beauté qu’il a entrevue : que l’on partage ou non son enthousiasme, cela ne lui importe guère. Il est amoureux. L’amour est sa fin et sa justification. Que lui faut-il d’autre ? Éros doit-il se justifier devant qui que ce soit alors que lui-même justifie tout ? Il a illuminé, il a créé de la beauté, le reste lui est indifférent. Sa tâche consiste uniquement à arracher l’homme à l’existence quotidienne, soucieuse. Éros surgit et c’est la fin de toutes les limitations, de tous les « travaux»; la fête commence : alors on peut ne plus peiner, « extraire » mais simplement « prendre »; alors les distinctions, les normes, les règlements tombent d’eux-mêmes. Sept cents ans plus tard, Plotin acheva ce que Platon avait laissé entendre. Monos pro monon : l’homme face à face avec Dieu, au delà, par delà tout ce qui lie, par delà le savoir avant tout, car ce qui nous lie le plus étroitement n’est-ce pas le savoir ? C’est «là» seulement, dans l’union avec Dieu, qu’est la liberté; c’est là qu’est la vérité, c’est là qu’est le but suprême auquel tend avidement notre être… Et cette union est un rapt, un «ravissement»; à l’inverse du savoir, il est le «soudain», l’instantané; il est ce qui ne peut absolument pas trouver place dans les catégories de l’intelligence, lesquelles ont pour fonction de transformer même les illuminations divines en ce qui semper ubique et ab omnibus creditum est.

(La balance de Job)

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