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michel_henry:henry-1963-ser-para-si

Henry (1963) – ser-para-si

(MHEM)

Les analyses qui précèdent prennent leur signification ontologique concrète si on veut bien les situer dans le cadre phénoménologique dont elles constituent à vrai dire une définition. Conformément à celle-ci, il apparaît que le passage de l’être-en-soi à l’être-pour-soi consiste dans la position hors de soi de l’être, est le passage de l’être à l’extérieur de soi ; ce qui se réalise dans un tel passage, c’est l’être-à-l’extérieur-de-soi de l’être-en-soi, et cet être-à-l’extérieur-de-soi est le pour-soi de l’être-en-soi, son existence. 10

L’essence est ce qui fait que l’être n’est pas seulement l’être-en-soi mais aussi l’être qui existe pour lui-même, l’être-pour-soi. 13

C’est justement parce que, selon Sartre, c’est l’être-en-soi qui devient pour-soi que le pour-soi porte en lui une contingence insurmontable en tant qu’il n’est jamais que l’être-pour-soi de l’en-soi, c’est-à-dire l’apparence de la détermination contingente. 13

A l’être-pour-soi qui appartient à l’essence de l’existence en tant que cette essence est la manifestation de soi s’oppose ainsi radicalement l’être-pour-soi qui désigne la compréhension existentielle de soi de l’existence à l’intérieur d’un acte déterminé de saisie et de représentation. 19

Bien qu’elle semble introduire la problématique dans la dimension originelle de l’être pour-soi, la distinction instituée par Hegel entre ce qui est pour la conscience et ce qui est pour nous, lui demeure en fait radicalement étrangère, elle ne concerne pas la structure ontologique de l’être-pour-soi. 19

On voit, plus précisément, l’ambiguïté foncière qu’il y a dans l’obligation faite à l’en-soi de devenir pour-soi lorsque, comme c’est le cas constamment dans la Phénoménologie de l’Esprit, l’en-soi désigne la réalité de la conscience, c’est-à-dire en fait la structure ontologique originaire de l’être-pour-soi. 19

La phénoménologie de l’esprit, la manifestation de la manifestation pure réside dans l’être-en-soi de la conscience qui est l’être-pour-soi originaire de l’être et, comme tel, la manifestation de la manifestation pure, la manifestation de l’esprit. 19

Nous disons à propos de cette vérité ontologique, « vérité que la conscience est en soi-même » et non « en elle-même », car la vérité ontologique qui constitue l’essence de la conscience est justement la vérité, la manifestation de soi de l’être, l’être-pour-soi lui-même et comme tel, dans sa structure ontologique originaire. 19

L’être-en-soi de la vérité est l’être-pour-soi. 19

L’être-pour-soi de la vérité est justement la conscience. 19

Que la conscience soit l’être-pour-soi de la vérité, c’est là justement sa vie. 19

Comment une telle conscience peut-elle naître ? Comment et pourquoi la conscience se représente- t-elle ainsi ? Sans doute la conscience ne devient-elle pour soi, dans sa représentation, la vérité de l’étant que parce qu’elle est en soi cette vérité, que parce que la vérité qu’elle est en soi est l’être-pour-soi. 20

Loin de résulter de la représentation de la vérité dans la conscience, l’être-pour-soi de la vérité en est au contraire la présupposition. 20

La conscience est pour soi en tant qu’elle est en soi la vérité et, comme telle, l’être-pour-soi lui-même dans sa structure ontologique originaire. 20

Pour instituer une dialectique qui repose sur la comparaison de la conscience de soi et de la conscience de l’objet, il faut traiter subrepticement cette conscience de soi comme une représentation de soi, confondre la signification ontologique de l’être-pour-soi avec sa signification existentielle. 20

Ainsi voit-on l’être-pour-soi déchoir de sa condition ontologique primitive pour devenir l’un de ces objets. 20

L’expérience réelle ne se produit ni devant la conscience, ni derrière elle, elle se produit dans la dimension ontologique originaire de l’être-pour-soi. 20

En confondant ainsi la signification ontologique et la signification existentielle de l’être-pour-soi, Hegel faisait du savoir réel une représentation. 20

La confusion de la signification ontologique et de la signification existentielle de l’être-pour-soi est identiquement celle du savoir réel et du savoir vrai. 20

Avec l’essence qui constitue la structure ontologique de l’être-pour-soi et de la vérité absolue, la « conscience » qui désigne la représentation de cette essence ne peut se recouvrir, fût-ce dans le savoir philosophique, car, comme on l’a vu, la différence entre la réalité et sa représentation ne peut être supprimée. 21

L’absolu, si l’on veut bien entendre par là l’être-pour-soi originaire de l’essence qui fait d’elle la réalité, ne se produit pas dans l’histoire. 21

Mais l’en-soi de l’esprit est l’être-pour-soi originaire de l’essence de la manifestation, et cet être-pour-soi de l’essence n’est pas le fait de la représentation mais sa condition. 21

Cette absurdité devient plus évidente au moment où ce qui fait l’insuffisance ontologique de l’être-pour-soi ou de la conscience est explicitement interprété comme le manque de l’être-en-soi, c’est-à-dire d’un élément par principe non ontologique. « 28

Que le cogito conduise inévitablement hors de soi, vers le dehors, ne signifie pas (si du moins nous voulons donner une portée philosophique à ce texte en mettant à jour la présupposition ontologique implicite sur laquelle il repose en fait) qu’à l’élément ontologique pur de l’être-pour-soi doive nécessairement s’adjoindre l’être-en-soi (l’étant) comme constituant avec lui la réalité concrète de la phénoménalité effective : cette réalité est incluse dans l’élément ontologique lui-même. 28

Ce qui est en question, malgré l’apparence, c’est cet élément ontologique pur, c’est la structure interne de l’être-pour-soi. 28

Ce n’est plus « l’être-en-soi », ici, c’est le « phénomène » qui se donne comme constituant avec la conscience la totalité synthétique concrète où se réalise l’être-pour-soi effectif, c’est-à-dire la phénoménalité elle-même. 28

L’être-pour-soi du rapport qui le rend possible comme rapport, toutefois, est déterminé. 33

L’être-pour-soi du Concept est justement la suppression de son être-en-soi. 76

La réalisation de l’être-pour-soi par la médiation de la manifestation objective ayant la signification d’être l’aliénation de l’acte originaire du Concept, la détermination objective manifeste cette aliénation sous la forme de sa propre finitude. 76

L’essence, dit Hegel, se contemple donc seulement soi-même dans son être-pour-soi ; elle est dans cette aliénation seulement près de soi-même. 77

L’être-pour-soi qui s’exclut de l’essence est le savoir de soi-même de l’essence. » 77

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