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Bréhier-Plotin: sympathie
quinta-feira 1º de fevereiro de 2024, por
Recherchons encore le mode d’union de l’âme et du corps. Peut-être n’est-elle pas plus possible que, par exemple, celle d’une ligne et de la couleur blanche, c’est-à-dire de deux natures différentes. Est-ce un entrelacement ? L’entrelacement ne fait pas la sympathie ; des choses entrelacées peuvent ne rien éprouver les unes des autres ; l’âme, tout en étant répandue à travers le corps, pourrait n’en pas éprouver les passions et être comme la lumière, surtout si on peut la considérer comme entrelacée au milieu qu’elle traverse. L’âme n’éprouvera pas les passions du corps, du fait qu’elle y est entrelacée ; elle sera dans le corps comme la forme est dans la matière. Mais puisqu’elle est une substance, l’âme sera une forme séparée du corps, et il sera préférable de la considérer comme se servant du corps. Est-elle comme la forme que l’on donne au fer pour fabriquer une hache ? c’est alors la hache, couple du fer et de la forme, qui agit, c’est le fer doué d’une certaine forme ; et il agit selon cette forme. C’est alors plutôt au corps qu’il faudrait attribuer les passions qu’il partage avec l’âme, mais au corps vivant, j’entends le « corps naturel, organisé et possédant la vie en puissance ». [Aristote ] dit bien en effet que s’il est absurde de prétendre que c’est l’âme qui tisse, il est aussi absurde de prétendre que c’est elle qui désire et qui souffre ; c’est bien plutôt l’animal. ENNÉADES - Bréhier : I, 1 [53] - Qu’est-ce que l’animal ? Qu’est-ce que l’homme ? 4
Mais puisque Platon indique que la ressemblance avec Dieu est d’une autre espèce, en tant qu’elle appartient aux vertus supérieures, il nous faut parler de cette autre ressemblance ; ainsi nous verrons plus clairement quelle est l’essence de la vertu civile et celle de la vertu supérieure et, d’une manière générale, nous verrons qu’il existe une vertu différente de la vertu civile. Platon dit d’abord que la ressemblance avec Dieu consiste à fuir d’ici-bas ; ensuite il appelle les vertus dont il parle dans la République non pas simplement vertus, mais vertus civiles ; enfin ailleurs il appelle toutes les vertus des purifications ; tout cela fait voir qu’il admet deux genres de vertus et qu’il ne met pas dans la vertu politique la ressemblance avec Dieu. En quel sens disons-nous donc que les vertus sont des purifications et que par la purification, surtout, nous devenons semblables à Dieu ? N’est-ce pas parce que l’âme est mauvaise tant qu’elle est mêlée au corps, qu’elle est en sympathie avec lui et qu’elle juge d’accord avec lui, tandis qu’elle est bonne et possède la vertu si cet accord n’a plus lieu, et si elle agit toute seule (action qui est la pensée et la prudence), si elle n’est plus en sympathie avec lui (et c’est là la tempérance), si, le corps une fois quitté, elle ne ressent plus la crainte (c’est le courage), si la raison et l’intelligence dominent sans résistance (c’est la justice). L’âme, ainsi disposée, pense l’intelligible et elle est ainsi sans passion. Cette disposition peut être appelée, en toute vérité, la ressemblance avec Dieu car l’être divin est pur de tout corps et son acte également ; l’être qui l’imite possède donc la prudence. - Mais, dira-t-on, de telles dispositions existent-elles dans l’être divin ? - Non certes, il n’a pas de dispositions du tout ; on ne trouve de dispositions que dans l’âme. - De plus, l’âme a des pensées changeantes ; elle pense un même être intelligible sous des aspects différents et sans penser du tout aux autres. La pensée de Dieu et celle de l’âme n’ont donc que le nom de commun ? - Du tout ; mais l’une est primitive et l’autre dérivée et différente. Comme le langage parlé est une image du langage intérieur à l’âme, celui-ci est une image du Verbe intérieur à un autre être. Comme le langage parlé, comparé au langage intérieur de l’âme, se fragmente en mots, le langage de l’âme, qui traduit le Verbe divin, est fragmentaire si on le compare au Verbe. Oui, la vertu appartient à l’âme et non pas à l’Intelligence, ni au principe supérieur à l’Intelligence. ENNÉADES - Bréhier: I, 2 [19] - Des vertus 3
Or, quand on aime un être, et qu’on a de l’affinité avec lui, on a aussi de la sympathie pour ses images. Si on niait cette cause de la passion, on ne pourrait expliquer comment et pourquoi elle naît, pas même dans le cas de l’amour sexuel. Car ceux qui éprouvent ce genre d’amour veulent engendrer dans la beauté ; il serait absurde que la nature, qui aspire à produire de belles choses, voulût en-endrer dans la laideur. Ceux qui sont portés à engendrer ici-bas, se contentent de la beauté d’ici-bas, c’est-à-dire de celle qui se trouve dans les images et dans les corps ; ils ne possèdent pas cette beauté archétype qui est pourtant la cause de leur amour pour les choses d’ici-bas. Quand, partant de cette beauté d’ici-bas, ils ont souvenir de celle d’en haut, ils ne se plaisent plus à l’une que parce qu’elle est l’image de l’autre. Mais quand ils n’ont pas ce souvenir, faute de comprendre leur passion, ils s’imaginent que la beauté d’ici-bas est la véritable beauté. ENNÉADES - Bréhier: III, 3 [50] - De l’Amour 1