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Daumal (Bharata) – Bhagavad Gita XV

domingo 11 de setembro de 2022

      
Le Bienheureux dit :
 
1. Racines-en-haut [1] et branches-en-bas,
impérissable on dit l’[arbre] [2] Açvattha —
Les Mètres [sacrés] sont ses feuilles,
et qui le connaît connaît le Savoir. [le Veda  ]
 
2. En-bas, en-haut-aussi, se développent ses branches,
Nourries-des-[Trois]-Modes [3], bourgeonnantes-des-choses [4],
Et-vers-le-bas ses racines vont-s’étendant,
Liens-de-l’action dans-le-monde-des-humains ;
 
3. Ainsi sa forme, on ne la peut ici saisir,
Sa fin non plus, son commencement ni sa base,
De-l’Açvattha-la racine est-forte  -racine,
Détachement est la solide épée qui l’a tranchée;
 
4. De cet endroit il faut donc chercher-la-piste,
Où parvenu, l’on ne s’en retourne plus.
C’est vers cet Homme primordial que je marche,
De qui découle le cours de l’antique coulée.
 
5. Sortis-d’orgueil-et-de confusion, du-mal-d’attachement-vainqueurs,
Toujours-à-Soi-présents, ayant-détourné-les désirs,
Libérés des contraires qu’on-nomme-plaisir-et-peine,
Ils vont, les sans-illusion, à ce signe impérissable.
 
6. Le Soleil   ne l’éclaire pas,
Ni l’astre-tacheté [5], ni le feu [d’ici-bas] [6].
Là venu, l’on n’en revient plus,
C’est là ma demeure-la-plus-haute.
 
7. De moi une parcelle, dans-le-monde-de-la-vie,
Devenue-vie, perpétuelle,
Agglomère les sens — dont l’esprit   est sixième —,
En les tirant de la Substance-naturelle. [prakrti]
 
8. Que d’un corps il s’empare
Ou qu’il le quitte, le Seigneur
Prend ces [sens] et il les rassemble,
Comme l’air prend les parfums de leurs réceptacles.
 
9. Dans l’ouïe, la vue, le toucher,
Dans le gout et dans l’odorat
S’installant, aussi dans l’esprit,
Alors des choses il jouit.
 
10. Qu’il s’en aille ou qu’il demeure,
Ou qu’il goute [7] selon les [Trois] Modes, [8]
Les confus ne le voient point,
Le voient ceux qui ont l’œil-de-connaissance.
 
11. Les ascètes qui s’efforcent yogin
Le voient en Eux-mêmes [9] fixé
Même s’efforçant, ceux-qui-ne se-sont-faits-Eux-mêmes [10]
Les inconscients ne le voient point.
 
12. Cette éclatante-ardeur qui du Soleil
Illumine ce monde [11] tout entier
et qui brille dans la Lune   et dans le feu,
Sache que cette ardeur est Mienne.
 
13. Dans la Terre ayant pénétré,
Je soutiens Les créatures par mon énergie;
Et Je nourris toutes les plantes,
Devenu sève savoureuse.
 
14. Moi, devenu le [Feu]-de-tous-les-hommes [12],
Entré dans le corps des êtres-respirants,
Me joignant à l’inspir et à l’expir,
Je cuis la quadruple nourriture.
 
15. Dans le cœur de chacun, Moi Je suis installé,
Par Moi mémoire et connaissance viennent ou s’en vont.
A travers tous Savoirs c’est Moi seul qui suis à savoir [veda]
Je suis l’auteur de la Fin-du-Savoir [13], Je suis celui-qui-sait-le-Savoir.
 
16. Deux Êtres-actifs [14] sont dans le monde,
L’un dissoluble et l’autre indissoluble.
Le dissoluble est toutes créatures,
« Debout au faîte » est appelé l’indissoluble.
 
17. Mais il est un autre Être-actif, supérieur,
« Le Suprême-Soi » on le nomme,
C’est lui qui, pénétrant le Triple-monde,
Le supporte, lui l’impérissable Seigneur.
 
18. Et parce que Moi Je dépasse le dissoluble
Et Je suis plus haut même que l’indissoluble,
Pour cela Je suis, dans le monde et dans le Savoir,
Proclamé l’Être-actif Suprême.
 
19. Celui qui, sans trouble en lui-même,
Me connaît tel, Moi l’Être-actif-suprême,
Celui-là, sachant tout, Me recherche d’amour
De tout son être, Bharata  !
 
20. Telle est la Science la plus cachée,
Que Je t’ai dite, à toi qui es sans-faute;
Qui l’a comprise a la compréhension
Et a fait ce qu’il devait faire, Bharata!
 
Tel est, dans les Chants du Bienheureux Seigneur, dans ces Upanishad  , cette science du Sacré, ce traité du Yoga  , dans le dialogue entre le Glorieux Krishna   et Arjuna, la XVe Lecture, nommée :
 
le yoga de l’Être Actif Suprême. [15]

Ver online : René Daumal


[1Chaque groupe de mots liés par des traits d’union traduit un seul mot sanskrit (en général, mot composé).

[2Les mots entre crochets sont impliqués dans le texte, mais n’y sont pas littéralement.

[3Les trois modes d’être (guna) de toute existence (lumineux, passionnel, inerte).

[4Ses bourgeons sont les objets des sens.

[5çaçanka, « marqué comme un lièvre », Lune.

[6pavaka, le « purificatoire » allumé par les hommes, et non Agni le dieu-feu.

[7« qu’il fruisse », si l’on pouvait dire.

[8Les 3 guna.

[9En atman, le « Soi ».

[10A-krta-âtman « non-fait-Soi ».

[11Jagat, étymologiquement « le Mouvant ».

[12Un nom du Feu.

[13Le vedânta, c’est-à-dire l’enseignement des upanishad.

[14littéralement « Deux hommes, deux mâles ».

[15mètres employés :

a) mètre anustubh

stances 1, 6 à 14, et 16 à 20.

b) mètre tristubh stances 2, 3, 4, 5 et 15.

c’est-à-dire la césure après la 4e ou la 5 e syllabe est généralement précédée d’une longue, et toujours suivie d’un anapeste; et le vers se termine toujours par

(l’anapeste suivant la césure est senti comme un pied central, ce qui divise le vers en 3, d’où le nom : « à 3 arrêts »).