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Daumal (CC:242-243) – amor - sabor

segunda-feira 12 de setembro de 2022

      

(Sahitya-darpana, IIIe Section, 33 sqq. :)

Un sentiment principal — tel que l’amour, etc... — suscité par la représentation de ses circonstances déterminantes, effets extérieurs et accompagnements accessoires, arrive à la nature de saveur pour ceux qui ont une conscience.

La Saveur va être décrite ici en elle-même, dans son aspect indivisible de moment de conscience provoqué à l’occasion d’une émotion :

Surgie du principe essentiel (du sattva  , principe pur et lumineux, opposé à tamas, principe obscur et d’inertie, et rajas, principe intermédiaire et de passion), sans parties, brillant de sa propre évidence, faite de joie et connaissance (unies), libre de tout contact d’autre perception, sœur jumelle de la gustation du divin, vivante du souffle de l’Admiration surnaturelle, — telle est la Saveur que quelques-uns, ceux qui ont un jugement intérieur, goutent comme la propre forme de soi, inséparablement.

Elle est connaissance, « brillant par elle-même » [...] Elle est joie, même dans la représentation d’objets douloureux, même si elle fait verser des larmes [...], car elle est une recréation surnaturelle des états représentés. [... Elle est simple, comme la saveur d’un plat complexe. Elle suppose la réminiscence d’impressions latentes (vasana). Elle exige un acte de « communion » entre l’acteur (ou le poète), le héros représenté et l’auditeur. Elle n’a pas d’existence antérieure à sa perception, comme une cruche qu’on vient à éclairer avec une lampe. Elle n’est pas un produit de la combinaison d’éléments préexistants. Elle n’est ni passée, ni présente, ni future.] Elle est donc bien surnaturelle (non mondaine);... on ne la connaît qu’en la mangeant.

[L’« admiration surnaturelle », étonnement et expansion de l’esprit   causés par un contact avec une réalité supérieure à ce monde, est le fondement   de toutes les saveurs, et se retrouve donc dans toute poésie véritable.]

[On appelle aussi « saveurs », par extension : 1) les « saveurs-sentiments »; par exemple, un sentiment comme l’amour, éprouvé par un être humain pour un être supérieur à l’humanité ordinaire; nous ne pouvons en avoir une « gustation » parfaite, mais seulement un sentiment; 2) les « saveurs-reflets » (semblants de saveur); par exemple, la passion amoureuse non réciproque, ou chez un personnage vil, ou chez un ascète : elle ne peut atteindre son plein développement; 3) les « sentiments-reflets » (semblants de sentiments), combinaison des deux précédents; par exemple, la pudeur chez une prostituée, etc.; 4) parfois aussi, un sentiment décrit comme s’éteignant, ou s’éveillant, ou mêlé à d’autres, etc.]


Ver online : René Daumal